<107>sorti de ces chaussées, on arrive dans un pays moins coupé. Si l'on peut prévoir que l'on aura de pareilles marches à faire, il faut de nécessité pousser un corps au delà de ces chaussées, en avant, pour couvrir l'armée et l'empêcher d'être attaquée dans un terrain où difficilement elle pourrait combattre. S'il est possible d'éviter de pareilles digues, fût-ce même en faisant un détour de quelques milles, je conseillerais de prendre ce dernier parti; car, si l'ennemi est leste et entendu, et qu'il gagne la tête de ces chaussées, en y plaçant du canon, il peut enfiler vos colonnes et vous causer des pertes considérables, sans que dans ce terrain coupé vous puissiez vous revancher et rendre à cet ennemi le mal qu'il vous fait.
DES MARCHES DANS LES SAISONS DU PRINTEMPS ET DE L'AUTOMNE, OU LES CHEMINS SONT LE PLUS GATÉS.
Deux raisons obligent d'abréger les marches dans ces saisons : les mauvais chemins rompus et remplis de boue, et la courte durée des jours. Une armée ne peut faire que trois milles par jour. La peine de faire passer l'artillerie et le bagage par la fange absorbe un temps considérable, et l'on fatiguerait trop d'hommes et de chevaux, si l'on voulait faire de plus fortes traites. Si l'on trouve de meilleurs chemins, mais un peu plus détournés que ceux qui sont directs, il faut les choisir par préférence, et partager l'artillerie derrière la colonne qui passe sur le terrain le plus ferme. Si ce sont des détachements que l'on envoie, pour quelque dessein, à quelque distance de l'armée, on aura la prévoyance de ne leur point donner des pièces de douze livres; celles de six leur seront suffisantes; encore auront-ils bien de la peine à les traîner avec leur munition et tout l'attirail nécessaire.