<115>ces terrains; car il est souvent capital de ne pas se tromper sur ces connaissances. Les quartiers-maîtres doivent encore se prémunir contre la déposition des gens du commun; quelquefois même, étant de bonne foi, ils vous trompent par ignorance, parce qu'ils ne jugent des chemins et des lieux que par l'usage qu'ils en font, et que, manquant entièrement de connaissances militaires, ils ignorent l'emploi qu'un guerrier peut faire du terrain. En 1745, lorsque après la bataille de Soor l'armée prussienne voulut se retirer en Silésie, je fis venir des gens de Trautenau et de Schatzlar, pour les interroger sur les chemins où je voulais faire passer les colonnes. Ils me dirent bonnement que ces chemins étaient admirables, et qu'ils y passaient à merveille avec leurs voitures, et que beaucoup de rouliers les passaient de même. Peu de jours après, l'armée fit cette marche. Je fus obligé de faire mes dispositions pour la retraite sur ces lieux. Noire arrière-garde fut vivement attaquée; mais, par les précautions que je pris, nous ne perdîmes rien. Ces chemins, militairement parlant, étaient très-mauvais; mais ceux auxquels je m'en informai n'y entendaient rien, et ce qu'ils me dirent était de bonne foi et sans intention de me tromper. Il ne faut donc pas se fier au rapport des ignorants, mais, ayant la carte à la main, les consulter sur chaque forme de terrain, s'en faire des notes, et voir sur cela s'il y a moyen de croquer quelque chose, sur le papier, qui donne une idée plus exacte du chemin que celle que présente la carte.
DES TALENTS QUE DOIT AVOIR UN QUARTIER-MAITRE.
Le défaut par lequel les hommes pèchent le plus, c'est de se contenter d'idées vagues, et de ne point s'appliquer assez pour se former des idées nettes des choses auxquelles ils sont employés. Par exemple, plus on a une connaissance spéciale du terrain où l'on doit agir, mieux on choisit les lieux propres au campe-