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II. AVANT-PROPOS.[Titelblatt]

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AVANT-PROPOS.

Le nombre de la noblesse qui se voue au métier des armes est considérable en tout pays; mais les motifs qui la portent à choisir un métier aussi illustre ne sont pas les mêmes. Les uns, dépourvus des biens de la fortune, regardent le service comme un pis aller qui leur procure tellement quellement un entretien honnête; leur indolence se confie sur le temps, qui les fera avancer à tour de rôle; ils croient que d'avoir servi longtemps ou d'avoir bien servi, c'est la même chose, et pourvu qu'on ne puisse pas leur reprocher quelque faute grossière contre leur devoir, ils sont satisfaits d'eux-mêmes. D'autres s'adonnent aux frivolités dont notre siècle abonde; ils se livrent aux plaisirs, aux dissipations; ils sont tout, hormis soldats, ce qui cependant est leur métier. Enfin, il s'en trouve, mais toujours en plus petit nombre, qui, pleins d'une noble ambition, ont envie de se pousser dans le monde par leur courage, par leur capacité, par leur sagesse, qui, avides de s'instruire, ne désirent que d'avoir des occasions de s'éclairer et d'augmenter la sphère de leurs connaissances. C'est précisément pour ceux-là qu'on a fait un extrait de siéges de villes attaquées et défendues vers la fin du dernier siècle et au commencement de celui-ci. On a eu soin de faire un choix de ce qu'il y a eu de plus célèbre dans ces temps, pour présenter aux curieux les res<52>sources que l'art et le génie trouvent pour attaquer les places et pour les défendre. Quiconque veut passer pour un officier habile doit réunir une infinité de connaissances et de talents. Il faut qu'il sache dresser sa troupe pour rendre le soldat susceptible d'exécuter les évolutions qu'il doit faire; il faut qu'un officier, pour peu qu'il pense à s'élever aux grades supérieurs, ait une connaissance parfaite de la tactique ou de l'art des manœuvres, attaques, défenses, retraites, marches, passages de rivières, convois, fourrages, et de toutes les dispositions qu'exige la guerre de campagne. Il faut qu'il ait une connaissance nette du pays dans lequel il doit faire la guerre, qu'il possède la castramétrie, ou l'art des campements, l'usage et l'avantage qu'on peut tirer du terrain, la façon d'y distribuer les troupes et de les faire combattre avec supériorité. Mais, outre toutes ces connaissances, un officier d'infanterie ne saurait ignorer sans honte ce qui regarde l'attaque et la défense des places; ce service roule uniquement sur l'infanterie, et il se fait peu de campagnes où il n'y ait quelque ville assiégée ou défendue. Cela fournit des occasions pour se distinguer; un officier qui ignore l'art n'en saurait profiter, parce que son ignorance lui en interdit les moyens, au lieu qu'un officier qui a consacré quelques-unes de ses heures de loisir à bien étudier cette partie trouve cent occasions pour faire connaître son mérite, ce qui doit nécessairement l'acheminer à sa fortune. C'est pour faciliter ces connaissances, c'est pour en inspirer le goût que ce livre a été traduit et mis au jour dans l'arrangement qu'il paraît; on espère que les vrais amateurs du métier seront bien aises de trouver un nouveau moyen de s'instruire, et le traducteur sera très-satisfait de ses peines, si, par le moyen des connaissances répandues dans ce livre, il peut contribuer à la fortune et à l'illustration de ceux qui le liront et sauront en profiter. Tout art a ses règles et ses maximes; il faut les étudier, leur théorie facilite leur pratique. La vie d'un homme ne suffit pas pour acquérir une connaissance et une expérience consommée; la théorie y sert de supplément, elle donne à la jeunesse une expérience prématurée, et la rend habile par les fautes mêmes de ceux qui en ont fait. Dans le métier de la guerre, on ne trans<53>gresse jamais les règles de l'art sans en être puni par l'ennemi, qui s'applaudit de nous trouver en défaut. Un officier peut s'épargner bien des faux pas en s'instruisant : nous osons dire qu'il le doit, car les fautes qu'il commet par ignorance le couvrent de honte, et, en louant même son courage, on ne peut s'empêcher de blâmer sa stupidité. Que de mot ils pour s'appliquer! que de raisons pour traverser ce chemin épineux qui mène à la gloire! et quelle récompense plus belle et plus noble que de parvenir par ses peines et par ses travaux à immortaliser son nom!59-a

Le 5 octobre 1771.


59-a Voyez ci-dessus, p. 53.