<164>venir que le froid était excessif; que la cavalerie avait été douze heures à cheval; mais qu'ils péchèrent en passant un bois qu'ils n'avaient pas fait fouiller d'avance : les moindres fautes à la guerre sont punies, car l'ennemi ne pardonne pas.
Le 12 fut employé à réparer le pont de l'Elbe, et le 13 le général Lehwaldt se joignit au prince d'Anhalt. C'était ce pont de Meissen pour lequel on craignait tant, que les Saxons auraient dû détruire : mais le ministère saxon, qui dominait les généraux, ne comprenait pas qu'un pont peut contribuer à la perte d'un pays. Ce pont était en partie de pierre de taille; il avait coûté cent cinquante mille écus à construire : il ne voulut jamais consentir qu'on le démolît, Ce conseil était composé d'un mélange de pédants et de gens parvenus : Hennicke, qui était à leur tête, avait été élevé par la fortune de valet de pied au grade de ministre. Il joignait au talent d'un financier l'art de fouler méthodiquement les sujets : son économie fournissait aux prodigalités du Roi comme aux dissipations de son favori. Avec ce crédit, il gouvernait la Saxe en subalterne sous le comte Brühl : de lui émanaient les ordres à l'armée; il en dirigeait les opérations; et c'est à son incapacité qu'il faut attribuer les foutes grossières des généraux saxons dans cette campagne d'hiver.
L'armée du Roi arriva le 14 à Königsbrück; à force d'aiguillonner le prince d'Anhalt, il s'avança le même jour à Neustadt, où les troupes furent obligées de camper malgré le froid perçant qu'il faisait alors. Le prince de Lorraine était arrivé le 13 décembre avec son armée auprès de Dresde. Hennicke, qui réglait tout, étendit si fort les quartiers des Autrichiens, qu'il leur aurait fallu vingt-quatre heures pour se rassembler. Le prince de Lorraine fit des représentations convenables pour qu'on changeât cette disposition; mais Hennicke, accoutumé à donner la loi aux fermiers et aux traitants, n'en tint aucun compte. Le prince de Lorraine, qui prévoyait que le comte Rutowski allait être attaqué, le pria de l'avertir à temps s'il avait besoin de lui, parce qu'il lui fallait du temps pour rassembler ses troupes dispersées : le comte Rutowski lui répondit qu'il n'avait pas besoin de secours; qu'il était assez en force dans le poste qu'il occupait, et que ja-