<49>maréchal de Coigny s'était retiré à Landau, il marcha par Germersheim pour le joindre au plus tôt.

Dès le 2 de juillet, le prince de Lorraine se vit maître du cours du Rhin depuis Schröck jusqu'à Mayence. Nadasdy et le prince de Waldeck étaient déjà à l'autre bord. Bärenklau avait de même passé ce fleuve du côté de Mayence. Le prince de Lorraine employa trois jours à passer ses ponts avec la grande armée. A peine y eut-il une tête à l'autre bord, qu'il envoya un détachement pour prendre Lauterbourg et s'emparer de ses lignes. Nadasdy poussa jusqu'à Weissenbourg : il le prit de même, et se posta dans ses lignes; les Autrichiens firent seize cents prisonniers dans cette expédition. M. de Coigny s'aperçut alors combien il lui importait de gagner la Basse-Alsace avant le prince de Lorraine, et il le prévint en prenant Weissenbourg par escalade, et en forçant les retranchements, où il éprouva une résistance vigoureuse. Nadasdy, forcé dans ce poste, se retira sur la grande armée qui campait auprès de Lauterbourg, et qui n'osa secourir Weissenbourg, parce que les détachements de Bärenklau et de Léopold Daun ne l'avaient pas encore jointe. M. de Coigny tira parti de ces délais, et de la crue du Rhin, qui empêchait la jonction des corps ennemis : il marcha sur la Sauer, passa la Motter auprès de Haguenau, et se campa à Bischweiler.

L'éloignement de M. de Coigny fit naître l'idée au prince de Lorraine de bloquer Fort-Louis, qu'on disait mal approvisionné. En conséquence, Nadasdy et Bärenklau prirent poste à Wörth,5 à Beinheim et sur les îles qui entourent Fort-Louis. Une crue du Rhin sauva cette place : la garnison regagna la communication de Strasbourg; on la renforça, et on la pourvut de vivres. Ce coup manqué, le prince de Lorraine porta ses troupes légères sur les ailes de l'armée française, et dans le bois de Haguenau, ce qui empêchait celle-ci d'envoyer des partis au delà de la Motter. Le maréchal de Coigny embarrassé de la situation où il se trouvait, en avait informé la cour. Louis XV, pour sauver l'Alsace, résolut de mener lui-même quarante mille hommes de l'élite de son armée de Flandre au secours de M. de Coigny, et lui ordonna de temporiser entre ce temps, et surtout de conserver ses troupes. Ce fut ce qui détermina M. de Coigny à changer de mesures, et à éviter tout engagement. Nadasdy, renforcé de troupes réglées, commençait à s'étendre vers les hauteurs de Reichshofen et Wasenbourg, comme s'il avait dessein de tourner le camp français par Lichtenberg et Buchsweiler; sur quoi, M. de Coigny se retira par Brumat à Strasbourg.6 Il se posta sur le canal de Molsheim, qu'il abandonna bientôt pour gagner les défilés de Pfalzbourg et de Sainte-Marie-aux-Mines. Il fit ces mouvements pour empêcher le prince de Lorraine, qui était à Brumat et qui faisait construire des ponts sur la Motter, d'occuper les gorges des montagnes par lesquelles l'armée du Roi devait passer pour le joindre.

Le roi de France était arrivé le 4 d'août à Metz, où il attendait les troupes de Flandre, pour fondre à leur tête sur l'armée du prince de Lorraine, et la détruire s'il était possible. Le maréchal de Schmettau avait été envoyé par le roi de Prusse auprès de Louis XV, tant pour rendre compte des mouvements de l'armée française, que pour presser le roi de France à remplir ses engagements, en poursuivant les troupes de la Reine à leur passage du Rhin et jusqu'en Bavière. Schmettau apprit au Roi Très-Chrétien que le roi de Prusse entrerait en campagne le 17 d'août, et qu'il emploierait cent mille hommes à la diversion qu'il allait faire en faveur de l'Alsace. Ce maréchal mit tout en usage pour donner aux armées françaises plus d'activité et de vigueur; et peut-être y aurait-il réussi, si Louis XV n'était pas tombé malade à Metz. Cette maladie commença par des maux de tête, que ses médecins et chirurgiens du corps crurent provenir d'un abcès dans le cerveau; ils déclarèrent ce mal sans ressource. Aussitôt on entoura le Roi de confesseurs, de prêtres, et de tout l'attirail dont se sert l'Église romaine pour envoyer les moribonds dans l'autre monde. L'évêque de Soissons, fanatique imbécille, vendit ses huiles et ses sacrements à son maître au prix de madame de


5 12 juillet.

6 31 juillet.