<105>par tant d'intrigues, et le duc de Newcastle rentra dans ses charges. Ces déplacements de ministres n'auraient cependant pas tiré à conséquence, s'il n'en était résulté une espèce d'inaction et de léthargie dans lesquelles restaient les affaires : les ministres et les grands étaient plus occupés de l'intérêt de leurs factions que des mesures à prendre contre la France. Plus animés contre les compétiteurs de leurs emplois que contre les ennemis de la nation, ils ne prenaient aucune mesure pour la campagne prochaine; personne ne pensait à former des projets pour la guerre de mer, jusqu'alors malheureuse, encore moins pour la guerre qui était sur le point d'embraser l'Allemagne.

Ce qui intéressait le plus le Roi dans ce moment, c'était de faire prendre aux Anglais des mesures relatives à la guerre du continent; et comme il prévoyait en gros sur quoi pourraient rouler les opérations de l'armée française dans l'Empire, il envoya au roi de la Grande-Bretagne un projet qu'il avait dressé pour la défense commune de l'Allemagne. Ce mémoire roulait sur les points suivants : il proposait de maintenir Wésel, pour en faire la place de guerre des alliés, par où l'on restait le maître de passer le Rhin; il demandait qu'on assemblât l'armée en un lieu convenable derrière la Lippe entre Wésel et Lippstadt : cette position donnait l'avantage de porter les troupes selon le besoin, soit vers le Rhin, soit vers le Wéser. De plus, si les Français marchaient en Hesse, l'armée de la Lippe, en s'avançant vers Francfort, les obligeait à quitter prise, et dans le temps que les opérations auraient éloigné du Rhin l'armée alliée, la forteresse de Wésel aurait assez longtemps occupé les Français pour lui donner le temps de revenir à son secours; d'ailleurs, tant que cette place tenait, il n'était pas à présumer que les troupes françaises du Bas-Rhin s'enfonçassent profondément en Westphalie. Le roi d'Angleterre, qui s'était peu appliqué à ces sortes de matières, lut le projet sans en comprendre l'importance, et puisqu'il y était question de soutenir Wésel, il se défia des raisons dont le roi de Prusse se servait : il avait en revanche une confiance entière en ses ministres de Hanovre, qui ne cessaient de lui représenter qu'il fallait se borner à la défense du Wéser. Cette idée était fausse en tout sens, parce que le Wéser est presque généralement