<164>l'aile gauche de cette armée : elle était étendue sur un tertre chargé de sapins, mais mal appuyée. Dès qu'on avait forcé ce poste, on gagnait l'avantage du terrain pour le reste de la bataille, parce que de là il va toujours en descendant et en baissant vers Nippern; au lieu qu'en s'attachant au centre, les troupes de l'aile droite autrichienne auraient pu, en traversant le bois de Lissa, tomber en flanc des assaillants, et qu'il aurait fallu toutefois finir par l'attaque de ce tertre, qui dominait sur toute cette plaine. C'aurait été réserver la besogne la plus dure et la plus difficile pour la fin, lorsque les troupes, harassées et fatiguées du combat, ne sont plus propres aux grands efforts; au lieu qu'en commençant par l'opération la plus rude, on profitait de la première ardeur du soldat, et le reste de l'ouvrage devenait aisé. Par une suite de ces raisons, on disposa incessamment l'armée pour l'attaque de la gauche. Les colonnes qui étaient dans l'ordre du déploiement furent renversées; on les mit sur deux lignes, et les pelotons par quart de conversion se mirent à défiler par la droite. Le Roi avec ses hussards côtoya la marche de son armée sur une chaîne de tertres qui cachait à l'ennemi les mouvements qui se faisaient derrière; et le Roi, se trouvant entre les deux armées, observait celle des Autrichiens et dirigeait la marche de la sienne. Il envoya des officiers de confiance, les uns pour observer la droite du maréchal Daun, les autres vers Canth pour veiller aux démarches de M. de Draskovics, qui y avait son camp. Des reconnaissances se firent en même temps le long du ruisseau de Schweidnitz, pour être sûr que rien ne vînt à dos de l'armée, lorsqu'elle s'engagerait avec l'ennemi.

Le projet que le Roi se préparait d'exécuter, était de porter toute son armée sur le flanc gauche des Impériaux, de faire les plus grands efforts avec sa droite, et de refuser sa gauche avec tant de prévoyance, qu'il n'eût point à craindre des fautes semblables à celles qui arrivèrent à la bataille de Prague, et qui causèrent la perte de celle de Kolin. Déjà M. de Wedell,a qui devait


a Charles-Henri de Wedell, frère cadet de George-Vivigenz de Wedell (t. III, p. 78), né le 12 juillet 1712 à Malchow dans la Marche-Ukraine, colonel en 1756, général-major le 6 décembre 1757, et le 26 février 1759, lieutenant-général. C'est le même qui eut le malheur de perdre la bataille de Kay.