<172>et se porta dans un bois où il était précisément dans le flanc des Russes; s'il avait attaqué cette armée tout de suite, il y a apparence qu'il l'aurait fait avec succès. Quoique son corps ne montât qu'à vingt-quatre mille hommes, il pouvait s'attendre à remporter des avantages, parce que les Russes furent surpris de le voir arriver, qu'ils ne s'attendaient pas à être attaqués, et qu'il régnait une grande confusion dans leur camp; ils étaient, outre cela, mal postés, et rien ne l'empêchait de marcher droit à eux. Il est impossible de dire quelles raisons le retinrent, et lui firent différer au lendemain ce qu'il pouvait exécuter sur-le-champ.

Il engagea l'affaire le 30. D'abord les hussards et les dragons prussiens firent plier devant eux la cavalerie russe et les Cosaques qui leur étaient opposés, et les rechassèrent jusqu'à leur camp. Les ennemis avaient changé, la nuit, de position, d'où il résulta que les dispositions que le maréchal de Lehwaldt avait faites la veille pour les attaquer dans le terrain où il les avait trouvés, ne cadraient plus avec l'emplacement actuel où il les trouvait alors; sa cavalerie de la gauche attaqua néanmoins celle des Russes, et la rejeta derrière son front; mais elle y essuya un feu si violent d'artillerie et de mitraille, qu'elle fut obligée de rejoindre l'infanterie prussienne. C'était dans le moment que M. de Lehwaldt attaquait un bois rempli d'abatis, dans lequel les Russes avaient placé leurs grenadiers; le bois était au centre de l'armée de M. d'Apraxin; ces grenadiers furent battus et presque tous détruits; mais le terrain fourré où cette action se passa, cachait aux Prussiens une manœuvre que faisaient alors les ennemis, et qui leur devint funeste : M. de Romanzoff s'avançait avec vingt bataillons de la seconde ligne des Russes, pour soutenir ces grenadiers; il se porta en flanc et à dos de l'infanterie prussienne; elle perdit insensiblement du terrain, et fut enfin obligée de se retirer. Cela se fit avec bonne contenance; les dragons et les hussards couvrirent sa retraite. Ce corps, qui ne fut point poursuivi par l'ennemi, revint à Wehlau reprendre son ancien camp. Le maréchal ne perdit dans cette affaire en morts, blessés et prisonniers que quatorze cents hommes, et treize canons.

M. d'Apraxin demeura encore quelques jours dans son camp de Jägersdorf. Le 7 de septembre, il fit mine de vouloir passer