<177>maient la grande alliance; de l'autre, la nécessité de continuer la guerre, et quelques rayons d'espérance portèrent la Prusse à faire les plus grands efforts pour se soutenir. Un nouveau ferment donna un nouveau degré d'activité à la politique, et les cours respectives se préparèrent, chacune de son côté, à pousser la guerre avec plus d'acharnement, de fureur et d'opiniâtreté que par le passé. Voilà, en général, le tableau des passions qui agitaient les princes et leurs ministres. La nature de cet ouvrage exige que nous descendions en de plus grands détails, et que nous parcourions successivement toutes les cours de l'Europe, pour nous représenter distinctement ce qui se passait dans chacune.
Il s'était fait, dès l'automne dernière, un changement dans le ministère britannique. M. Fox, que le duc de Cumberland y avait intrus par ses intrigues, s'aperçut qu'il ne pouvait plus se soutenir dans ce poste, à cause que la cabale qui lui était opposée, gagnait la supériorité; il résolut de se démettre volontairement de ses charges : il fut remplacé par M. Pitt, que l'éloquence et le génie élevé rendaient l'idole de la nation; c'était la meilleure tête de l'Angleterre. Il avait subjugué la chambre basse par la force de la parole, il y régnait, il en était, pour ainsi dire, l'âme. Parvenu au timon des affaires, il appliqua toute l'étendue de son génie à rendre sa patrie la dominatrice des mers, et pensant avec grandeur et élévation, il fut indigné de la convention de Kloster-Zeven, qu'il regardait comme l'opprobre des Anglais. Ses premiers pas dans sa nouvelle carrière allèrent tous à faire abolir jusqu'à la mémoire de ce traité honteux : ce fut lui qui persuada au roi d'Angleterre de mettre le prince Ferdinand de Brunswic à la tête de l'armée des alliés, et de le demander au roi de Prusse; ce fut lui qui proposa de renforcer les troupes d'Allemagne par un corps d'Anglais, qui les joignit effectivement dans l'année 1758. De plus, il jugea convenable à la gloire de sa nation de renouveler les alliances qu'elle avait contractées tant avec le roi de Prusse qu'avec divers princes d'Allemagne. Il envoya à cette fin M. Yorkea en Silésie, où une nouvelle convention fut signée : par l'un des articles, le roi d'Angleterre s'engageait à payer au roi de Prusse un subside annuel de quatre millions d'écus, pour la durée
a Sir Joseph Yorke, ministre d'Angleterre à la Haye.