<181>princesse aurait porté un préjudice considérable à ses affaires. Tant qu'elle demeurait en guerre avec l'Angleterre sur mer et en Allemagne, Louis XV, piqué de l'affront que l'affaire de Rossbach avait imprimé à ses armes, espérait de trouver dans la continuation de la guerre l'occasion de prendre sa revanche; et les ministres de la France travaillèrent à Vienne avec une application infinie à ranimer toutes les passions calmées de cette cour. La honte, pour une grande puissance, d'être abattue par un petit prince fit le plus d'impression sur l'esprit de l'Impératrice; l'ancienne animosité contre la Prusse se réveilla, les dispositions pour la paix s'évanouirent, et les liaisons d'amitié et d'intelligence entre les cours de Vienne et de Versailles se resserrèrent plus intimement : ainsi, au lieu que les succès des Prussiens dégoûtassent les puissances avec lesquelles ils étaient en guerre, ils les firent redoubler d'efforts pour paraître plus redoutables et plus dangereux que jamais à l'ouverture de la campagne prochaine.

Des mesures semblables se prenaient de la part du Roi pour rétablir pendant l'hiver l'armée, et la remettre en état d'agir avec vigueur. Il y avait à réparer les pertes qu'entraînaient sept batailles rangées que les Prussiens avaient livrées à leurs ennemis; mais quelque monde qu'eût consumé la guerre, cela n'approcha pas des ravages que des maladies épidémiques faisaient dans les hôpitaux; c'étaient des espèces de fièvres chaudes accompagnées de tous les symptômes de la peste; les malades tombaient en délire le premier jour de la maladie; ils prenaient des charbons au cou ou bien aux aisselles : que les médecins saignassent ou ne saignassent point, cela était égal; la mort emportait indifféremment tous ceux qui se trouvaient atteints de ce mal; le poison était même si violent, que, par des progrès rapides, les effets devenaient si prompts, que dans trois jours il mettait un homme au tombeau. On se servit sans effet de toutes sortes de remèdes; enfin, on eut recours à l'émétique, qui réussit; on en délaya trois grains dans une mesure d'eau, on en fit boire au malade jusqu'à ce que le remède commençât d'opérer, et ce fut un spécifique souverain contre cette maladie, car depuis que l'on s'en servit, de cent personnes à qui on le fit prendre, il en périt à peine trois. Sans doute que les causes de la maladie ne venaient que d'une