<22>ce comte Fersen, ennemi de la cour, obtint cette charge par les intrigues et l'appui de la faction française. Dans cette diète, commencée le 17 octobre 1755, le sénat, fier de sa supériorité, présenta un mémoire aux états, pour décider la grande querelle qui était entre lui et le Roi touchant la distribution des charges. Comme les juges étaient à la disposition de l'ambassadeur de France, le sénat triompha; il abusa de sa victoire, et s'en servit pour diminuer cette ombre d'autorité dont le Roi avait joui jusqu'alors selon les lois du royaume. L'insolence de ces magistrats alla même jusqu'à dépouiller la Reine des joyaux de la couronne, et de ceux qui lui avaient été donnés; il s'en fallut peu qu'au mépris de la majesté souveraine ces sénateurs séditieux n'entreprissent de renverser le trône. Ces procédés outrageants firent de vives impressions sur la cour, et sur ceux qui lui étaient attachés, principalement sur l'esprit des comtes Bonde et Horn et du sieur de Wrangel. Ces seigneurs s'assemblèrent dans les premiers mouvements de leur indignation, et résolurent de changer par un coup hardi la forme de leur gouvernement. Le Roi n'eut pas assez d'ascendant pour leur faire tempérer le parti violent qu'ils avaient pris; leurs mesures furent concertées tumultuairement, et plus mal exécutées encore; et par un mélange de sentiments audacieux et de timidité, ils hésitèrent au moment de l'exécution. Une entreprise différée est d'ordinaire découverte : quelques amis faibles, auxquels ils s'étaient confiés, les trahirent. Le sénat prit des mesures vigoureuses, pour se mettre à l'abri de toute entreprise : le comte Bonde fut arrêté; le sieur de Wrangel et quelques autres seigneurs de ce parti eurent le bonheur de se sauver. Le nom du Roi se trouva impliqué dans la déposition des conjurés. Enfin, le comte Bonde et plusieurs personnes d'une naissance obscure périrent sur l'échafaud,a et le Roi fut entièrement dépouillé des prérogatives dont son prédécesseur et lui avaient joui selon la forme de gouvernement établie depuis la mort de Charles XII. Depuis ce temps, il n'y eut que M. d'Havrincourt, ambassadeur de France, qui fût véritablement roi de
a Ce n'est pas le comte Bonde qui périt sur l'échafaud, mais le comte Éric Brahé, colonel de la garde à cheval, ainsi que le baron Horn et deux autres individus; tous quatre furent décapités à Stockholm le 23 juillet 1756.