<38>de l'Europe contre la Prusse était toute formée. L'Impératrice-Reine, celle de Russie, les rois de France et de Pologne étaient d'accord, et sur le point d'entrer en action, de sorte que le Roi n'en aurait eu ni un ami de moins, ni un ennemi de plus. Enfin, il s'agissait du salut de l'État et du maintien de la maison de Brandebourg : n'aurait-ce pas été dans un cas aussi grave, aussi important, commettre en politique une faute impardonnable, que de s'arrêter à de vaines formalités, dont on ne doit pas s'écarter dans le cours ordinaire des choses, mais auxquelles il ne faut pas se soumettre dans des cas extraordinaires où l'irrésolution et la lenteur auraient tout perdu, et où l'on ne pouvait se sauver qu'en prenant une résolution vigoureuse et prompte, et en l'exécutant avec activité?
Les différentes raisons que nous venons d'alléguer, déterminèrent le Roi à prévenir ses ennemis : il fit signifier à la cour de Vienne qu'il prenait sa réponse pour une déclaration de guerre, et qu'il se préparait à la lui faire; il travailla ensuite aux dispositions nécessaires pour mettre les troupes en mouvement. Pour cette année, la Prusse n'avait rien à craindre de la part de la Russie, par les raisons que nous avons rapportées plus haut; de sorte que le maréchal Lehwaldt se contenta de rassembler aux environs de Königsberg les troupes qu'il avait sous ses ordres, afin de les avoir à portée, et de pouvoir les mettre en campagne, si les circonstances l'exigeaient.
Le Roi se proposa d'attaquer les Autrichiens avec deux armées : le maréchal Schwerin, qui reçut le commandement de celle de Silésie, devait pénétrer dans le cercle de Königingrätz; l'autre, qui devait agir contre les Saxons et les Autrichiens en même temps, devant être naturellement la plus forte, fut formée des régiments de la Poméranie, de l'Électorat, du duché de Magdebourg, et des provinces de la Westphalie : le Roi voulut la commander en personne. Son dessein était d'entrer en Saxe sur plusieurs colonnes en même temps, ou pour désarmer les troupes, si on les trouvait répandues dans leurs quartiers, ou pour les combattre, si on les trouvait rassemblées en corps, afin de ne point garder un ennemi à dos en avançant en Bohême, et s'exposer à une perfidie semblable à celle que les Saxons firent aux