<232>du commerce, dont, pendant la guerre, ils avaient été presque seuls en possession. La Russie avait à la vérité dépensé des sommes considérables; mais elle avait plus fait la guerre sur le compte des Prussiens et des Polonais que sur le sien propre. La Suède se trouvait sur le point de faire banqueroute. Elle avait non seulement entamé les fonds de la banque; de plus, par une opération maladroite de ses financiers, elle avait trop multiplié les billets, ce qui détruisit l'équilibre que tout État bien policé doit tenir entre le papier et l'argent monnayé.

La Prusse avait le plus souffert par cette guerre. Autrichiens, Français, Russes, Suédois, cercles, jusqu'au duc de Würtemberg, y avaient fait des ravages; aussi l'État avait dépensé cent vingt-cinq millions d'écus pour l'entretien des armées et autres dépenses militaires. La Poméranie, la Silésie et la Nouvelle-Marche demandaient de grandes sommes pour leur rétablissement. D'autres provinces, comme le duché de Crossen, la principauté de Halberstadt et celle de Hohnstein, exigeaient également de grands secours, et il fallait des efforts soutenus de beaucoup d'industrie, pour les remettre dans l'état où elles étaient avant les troubles, parce que la plupart des champs n'étaient pas cultivés, faute de semences et de bestiaux; et tout ce qui sert à l'alimentation d'un peuple, y manquait également.

Pour subvenir à tant de maux, il fut distribué dans ces provinces, selon une juste répartition, vingt-cinq mille mesures1 de blé et de farine, et dix-sept mille d'avoine; trente-cinq mille chevaux tant des régiments que de l'artillerie; et des vivres furent donnés aux gentilshommes et aux paysans. Outre ces secours, le Roi donna à la Silésie trois millions pour son rétablissement, un million quatre cent mille écus à la Poméranie et à la Nouvelle-Marche, sept cent mille à l'Électorat, et cent mille au duché de Clèves, outre huit cent mille que reçut le royaume de Prusse; l'on réduisit à la moitié les contributions du duché de Crossen, du Hohnstein et du Halberstadt : enfin le peuple reprit assez de courage pour ne pas désespérer de sa situation, pour travailler, et pour réparer par son activité et son industrie les maux que l'État avait soufferts.


1 Winspels.