<138>l'Électeur palatin et ce prince même, auquel elle promit des établissements avantageux pour ses bâtards, pourvu qu'il leur sacrifiât ses successeurs légitimes, à la tête desquels était le duc de Deux-Ponts.
A peine apprit-on à Vienne la mort de l'électeur de Bavière, que le conseil s'assembla : l'Empereur proposa d'envahir la Bavière; l'Impératrice-Reine consentit avec répugnance à une démarche aussi violente, ou plutôt elle se laissa entraîner à la persuasion du prince Kaunitz, qui l'assura que cet événement n'aurait point de suites, et que l'Europe consternée ou léthargique n'oserait pas traverser l'Empereur dans une entreprise aussi hardie que décisive. D'abord seize bataillons, vingt escadrons et quatre-vingts canons se mettent en marche. L'Électeur palatin, qui était à Munich, pâlit à cette nouvelle; une terreur panique offusque son peu de raison; sa pusillanimité l'emporte; et il signe sa honte,a en abandonnant les deux tiers de la Bavière à la voracité des Autrichiens.
Cette action aussi violente qu'injuste se répandit partout. L'Empereur s'était trop démasqué pour que l'Europe ne jugeât pas de ce qu'annonçait de suites une ambition aussi effrénée. Dans ce moment de crise, il fallait prendre un parti, ou celui de s'opposer avec vigueur à ce torrent qui allait se déborder si rien ne l'arrêtait, ou il fallait que tout prince de l'Empire renonçât aux priviléges de sa liberté, parce qu'en demeurant dans l'inaction, le corps germanique semblait approuver tacitement le droit que l'Empereur voulait s'arroger de disposer despotiquement des successions qui viendraient à vaquer; ce qui tendait au renversement général des lois, des traités, des confraternités et des priviléges qui assuraient les possessions de ces princes. Toutes ces funestes conséquences n'avaient point échappé à la pénétration du Roi; mais avant que d'en venir aux remèdes violents, il y avait des arrangements préalables à prendre : il fallait que le prince de Deux-Ponts protestât contre le traité de Munich; que la Saxe réclamât l'assistance du Roi pour sa succession allodiale; mais surtout que l'on pressentît les cours de Versailles et de Pétersbourg, afin de pénétrer leur façon de penser, et d'être sûr à quoi on pouvait s'attendre de leur part.
a La convention du 3 janvier 1778.