<146>beau jeu au prince Henri, et aurait facilité toutes les opérations de sa campagne.

Quelque avantageux que fût ce projet, le Roi fut obligé de s'en désister, par les raisons suivantes : en premier lieu, les Autrichiens ne laissèrent qu'environ dix mille hommes en Moravie; le reste, commandé par le prince de Teschen, joignit l'Empereur auprès de Jaromircz. Il résultait de là que si le Roi entrait en Moravie avec soixante mille hommes, toute l'armée de l'Empereur, portée à quatre-vingt mille combattants, aurait tenté une diversion dans la Basse-Silésie, contre laquelle les troupes dont on destinait le commandement au général Wunsch, auraient été trop inférieures en nombre pour y pouvoir résister; d'où il serait résulté que le Roi se serait vu obligé d'abandonner l'offensive dans la Haute-Silésie, pour courir défendre le comté de Glatz ou les montagnes de Landeshut. En second lieu, la raison principale qui détermina pour l'entrée en Bohême, fut que l'électeur de Saxe craignait que les Autrichiens ne fissent une invasion dans ses États, et ne prissent Dresde, avant que les Prussiens pussent arriver à son secours, et que le prince Henri pensait à peu près de même. Il fallait empêcher l'Empereur d'exécuter ce dessein, au cas qu'il l'eût conçu; car il en serait résulté que l'électeur de Saxe, accablé, aurait pu être forcé à changer de parti, ou pour le moins qu'au lieu d'établir le théâtre de la guerre en Bohême, on l'aurait, par maladresse, établi en Saxe. Il fallut donc que le Roi entrât en Bohême avec ses forces principales, pour se présenter vis-à-vis de l'Empereur, et l'empêcher de renforcer le corps du maréchal Loudon, qui, sans secours, était trop faible pour s'opposer aux entreprises du prince Henri; mais, d'autre part, l'on ne pouvait pas laisser la Haute-Silésie sans défense, et il fallait opposer des troupes au général Ellrichshausen, qui se tenait dans le camp de Heydepiltsch, derrière la Mora. Ce furent MM. de Stutterheima et de Wernera qui furent chargés de ce comman-


a Joachim-Frédéric de Stutterheim (voyez ci-dessus, p.104), frère aîné d'Othon-Louis de Stutterheim (t. IV, p. 189, et t. V, p. 156), était né en 1715. Il devint lieutenant-général en 1767, et mourut en 1783.
     Paul de Werner (t. IV, p. 154, et t. V, p. 89) mourut lieutenant-général en 1785.