<151>ces différents sujets. Le sieur Thugut prit, sur cela, la parole, et dit au Roi qu'il serait facile de s'entendre, si l'on y procédait de bonne foi. L'intention des Autrichiens était de corrompre ce prince par des offres si avantageuses, qu'elles le fissent désister de l'appui qu'il prêtait à l'Électeur palatin. Pour cet effet, Thugut l'assura que sa cour non seulement ne s'opposerait point à sa succession éventuelle des margraviats de Baireuth et d'Ansbach, mais qu'encore elle offrait son appui à la Prusse pour le troc de ces margraviats contre des provinces limitrophes du Brandebourg, comme la Lusace ou le Mecklenbourg, si le Roi le jugeait conforme à ses intérêts.
Le Roi lui répondit que sa cour mêlait et confondait ensemble des choses qui n'avaient aucune connexion, savoir, sa succession légitime et indisputable sur ces margraviats avec l'usurpation de la Bavière, et l'intérêt de ses États avec l'intérêt de l'Empire, dont il embrassait la cause; que si l'on voulait s'entendre, il était nécessaire que sa cour se désistât d'une partie de la Bavière, et qu'on prît des mesures pour qu'à l'avenir des actes d'un despotisme aussi violent ne troublassent plus la sécurité du corps germanique, en ébranlant ses plus fermes fondements; et qu'à l'égard de cette succession, il était bien éloigné de forcer un prince quelconque à troquer ses États contre ces margraviats; enfin, que si un troc pareil avait lieu, il fallait que ce fût de bon gré qu'il s'arrangeât. Le Roi ajouta que ceci ne s'étant traité que verbalement, il voulait bien, pour donner à l'Impératrice des marques évidentes de ses dispositions pacifiques, minuter quelques articles principaux qui pourraient servir de base au traité qu'on se proposait de faire. Thugut s'offrit pour secrétaire; mais le Roi, qui ne se fiait ni à son style ni à ses intentions, les coucha lui-même par écrit. Certainement l'Impératrice-Reine aurait bien gagné en les acceptant. La cour de Russie ne s'était point encore déclarée; la France conseillait à l'Autriche de faire la paix; mais ses avis avaient peu d'influence sur l'esprit ardent et fougueux du jeune empereur et sur le génie impérieux du prince Kaunitz.
Voici le résumé de ce projet : l'Impératrice rendra la Bavière à l'Électeur palatin, à l'exception de Burghausen, des mines, et d'une partie du Haut-Palatinat; le Danube sera libre; Ratisbonne