<75>de l'améliorer plus que de le rétablir : c'était une création nouvelle qu'il fallait entreprendre. On trouva dans les caisses les fonds pour rebâtir les villes et les villages; on tira des magasins d'abondance les grains qu'il fallait pour la nourriture du peuple et pour l'ensemencement des terres; on prit les chevaux destinés pour l'artillerie, le bagage et les vivres, pour les employer au labourage. La Silésie fut déchargée de contributions pour six mois, la Poméranie et la Nouvelle-Marche pour deux ans. Une somme de vingt millions trois cent quatre-vingt-neuf mille écus fut donnéea pour soulager les provinces, et acquitter les contributions qu'elles avaient empruntées pour satisfaire aux impositions que les ennemis en avaient exigées. Quelque grande que fût cette dépense, elle était nécessaire et indispensable. La situation de ces provinces après la paix de Hubertsbourg rappelait celle où se trouva le Brandebourg après la fin de la fameuse guerre de trente ans. Alors l'État manqua de secours par le défaut de moyens, qui mettait le Grand Électeur hors d'état d'assister ses peuples; et qu'en arriva-t-il? qu'un siècle entier s'écoula avant que ses successeurs parvinssent à rétablir les villes et les campagnes dévastées. Cet exemple si frappant de ce que l'État avait souffert faute d'être secouru à temps, détermina le Roi à ne pas perdre un moment dans des conjonctures aussi fâcheuses, et à porter des secours prompts et suffisants pour réparer les calamités publiques. Des largesses multipliées rendirent le courage aux pauvres habitants, qui commençaient à désespérer de leur sort; avec les moyens qu'on leur fournit, l'espérance renaquit; les citoyens reprirent une nouvelle vie; le travail encouragé produisit l'activité; l'amour de la patrie reprit une force nouvelle; et dès lors toutes les terres furent recultivées, les manufactures reprirent leur ouvrage, et la police, rétablie, corrigea successivement les vices qui s'étaient enracinés durant l'anarchie.
Pendant cette guerre, les conseillers les plus âgés et tous les ministres du grand directoire étaient morts successivement; et dans ce temps de troubles, il avait été impossible de les remplacer. L'embarras était de trouver des sujets capables de gérer ces différents emplois : on fouilla dans les provinces, où les bons
a Les mots fut donnée manquent dans l'autographe.