<4>Il continua ensuite ses études en théologie, par déférence aux volontés de son père; et après avoir passé par les degrés qui précèdent le ministère, il fut revêtu de ce caractère en 1725. On lui confia la conduite de la petite église de Potzlow, village situé dans une des Marches.
La jeunesse de M. Jordan, la vivacité saillante de son esprit, et sa passion pour un genre d'étude tout différent de la théologie, lui firent sentir la grandeur du sacrifice qu'il faisait à son père. Pour l'en consoler, on le passa du village où il était, à Prenzlow, en 1727. Prenzlow était une sphère bien étroite pour M. Jordan. C'était un genet d'Espagne devant le soc d'une charrue. Son application et l'étendue de sa mémoire l'avaient mis en peu de temps au bout de sa bibliothèque. Un homme de son âge ne pouvait ni ne devait se restreindre à ne converser qu'avec des morts; il devait goûter la société des vivants. C'est ce qui l'engagea à épouser une personne dans laquelle il rencontrait les talents si rares de la beauté, de l'esprit et de la sagesse. C'était Susanne Perreault, avec laquelle il eut deux filles pendant les cinq années de leur mariage.
Ce même esprit qui donne le goût des sciences, porte ceux qui l'ont à remplir exactement leur devoir. Plus le jugement est sûr, les idées claires, le raisonnement conséquent; plus l'homme est porté à s'acquitter sans reproche de l'emploi, quel qu'il soit, qu'il doit remplir. M. Jordan agit ainsi. Y avait-il quelque mésintelligence dans le troupeau dont il était pasteur, c'était lui qui portait les paroles de paix, et qui travaillait avec une activité infatigable à réconcilier les esprits. Y avait-il des personnes affligées, c'était M. Jordan qui les consolait, qui abandonnait son étude, sa femme et tout ce qu'il avait de plus cher, pour rendre le repos et la tranquillité d'âme à ceux qu'une affliction immodérée, et le peu de forces qu'ils avaient sur eux-mêmes, en avaient privés. Y avait-il quelques malades ou quelques mourants, fussent-ils même de cette espèce humaine méprisée par l'avilissement des emplois dans lesquels elle vit; c'était encore M. Jordan dont le cœur compatissant et tendre assistait dans leurs dernières heures ces personnes, qui, sans lui, auraient souffert sans secours et seraient mortes sans consolation.