<42>marches, l'avait borné, dans l'étude de la géométrie, aux Éléments d'Euclide : il disait qu'il abandonnait la géométrie transcendante à des génies désœuvrés qui pouvaient la cultiver par luxe d'esprit. Sera-t-il croyable à la postérité que ce prince aimable, ayant à peine passé le seuil du sanctuaire des sciences, ait dû faire rougir tant de savants blanchis sous le harnois, qui, remplissant leur mémoire, n'ont jamais éclairé leur raison?

Un bon esprit apporte des dispositions à tout ce qu'il veut entreprendre : il est tel qu'un Protée, qui change sans peine de formes et paraît toujours réellement l'objet qu'il représente. Notre prince, qui était né avec ce don heureux, ne laissa point échapper la pratique de l'art militaire à la sphère de ses connaissances : il paraissait né pour tout ce qu'il faisait. Son émulation et son penchant se découvraient surtout dans ces courses annuelles où, se trouvant à la suite du Roi, il parcourait les provinces; il connaissait l'armée, et il en était connu; depuis les moindres détails jusqu'aux parties sublimes de cet art dangereux, rien n'échappait à son activité; avec cela, d'une humeur toujours égale, tempérant dans ses mœurs, adroit dans les exercices du corps, persévérant dans ses entreprises, infatigable dans ses travaux, et porté par préférence à tout ce qui peut être utile et honorable.

Tant de talents admirables que la nature avait accordés au prince Henri, ne formeraient cependant pas un éloge parfait, si les qualités du cœur, essentielles à tous les hommes, et surtout aux grands, ne s'y étaient jointes et n'eussent couronné l'œuvre.

Un plus vaste champ se présente à ma vue, et m'offre une riche moisson de vertus. Un enfant, dans l'âge où à peine l'âme commence à se développer, me fournit une foule d'exemples de perfections. Je n'avancerai rien, messieurs, qui ne soit soutenu par des preuves; et quel que fût mon attachement pour ce prince, il ne m'aveuglerait pas assez pour que je voulusse en imposer à des témoins. Mais qui me démentira, si je dis que le prince Henri, né avec un tempérament tout de feu, savait tempérer sa vivacité par sa sagesse? Ceux qui ont eu l'honneur de l'approcher, savent qu'on pouvait hardiment épancher son cœur dans son sein, sans craindre qu'il trahît les secrets qu'on lui avait confiés. Son cœur