<17>l'exécution de ces grands desseins semble être celui du décès de Sa Majesté Impériale. Quel temps plus propre pour donner des lois à l'Europe? Quelles conjonctures plus heureuses pour pouvoir tout oser?

Tous les électeurs se trouvent à présent désunis par les intérêts qui les partagent : les uns, cherchant des avantages particuliers, se jetteront dans les bras de la France, et sacrifieront l'intérêt commun; d'autres disputeront entre eux à qui aura l'Empire; d'autres se déchireront pour la succession de l'Empereur; d'autres, enflés par les espérances que leur donnent de grandes alliances, porteront partout le flambeau de la guerre, le trouble et la confusion; et ceux qui pourraient s'opposer à la force majeure de l'ennemi commun n'entreprendront rien, et abandonneront leur destinée au hasard.

De plus, par le dernier traité de pacification, la France s'engage à la garantie de la pragmatique sanction; cela l'oblige à se mêler indispensablement des affaires d'Allemagne après la mort de l'Empereur; et ce qui en cette occasion rendra les démarches de la France beaucoup plus dangereuses que dans d'autres, c'est qu'elles auront une apparence plausible de justice, et que leurs violences même auront un dehors d'équité.

Remarquons encore avec quel soin la France écarte les puissances maritimes de cette garantie. Croit-on que ce soit sans dessein qu'on les éloigne des affaires? Pourrait-on s'imaginer que quelque pensée frivole d'orgueil y aurait donné lieu? et serait-il possible de se figurer qu'un ministre qui a donné jusque dans ses moindres démarches des marques d'une prudence consommée, qu'un pareil ministre, dis-je, ait des vues si peu étendues? Rendons justice à la politique française : elle n'est jamais si bornée qu'on pourrait le croire.

Il serait possible qu'on fût bien aise de procurer du repos aux ministres anglais, qui sont assez occupés par les brouilleries intestines du royaume; et, avec cela, on est bien aise de ne point mêler les puissances maritimes dans les traités secrets des deux cours contractantes, afin que, les cas de la succession venant à exister, ces puissances n'aient aucun prétexte quelconque de se mêler des troubles de l'Allemagne.