<19>digne de la raison humaine, de plus instructif et de plus capable d'augmenter nos lumières.
L'esprit des hommes est le même dans tous les pays et dans tous les siècles : ils ont à peu près les mêmes passions; leurs inclinations ne diffèrent presque en rien; ils sont quelquefois plus furieux, quelquefois moins, selon qu'un malheureux démon d'ambition et d'injustice leur communique son souffle infecté et contagieux. Certaines époques se sont distinguées, parce que les passions des hommes y ont été plus agitées, et souvent récompensées. Telle est celle des conquêtes de Cyrus parmi les Perses, la bataille de Salamine et de Platée parmi les Grecs, le règne de Philippe et d'Alexandre le Grand chez les Macédoniens, les guerres civiles de Sylla, les triumvirats, le règne d'Auguste et des premiers Césars chez les Romains. En un mot, l'amour des arts et la fureur de la guerre ont parcouru tout le monde, et ont toujours produit les mêmes effets dans tous les endroits où ils ont établi leur domicile. La raison en est simple. L'esprit de l'homme, et les passions qui le gouvernent, sont toujours les mêmes; il faut donc nécessairement qu'il en résulte toujours les mêmes effets. Tout ce que je viens de dire des arts et de la guerre se trouve encore plus vrai à l'égard de la politique des grandes monarchies : elle a toujours été la même; leur principe fondamental a constamment été d'envahir tout pour s'agrandir sans cesse, et leur sagesse a consisté à prévenir les artifices de leurs ennemis et à jouer au plus fin.
Examinons à présent les procédés de Philippe de Macédoine envers les Grecs, et voyons si nous n'y trouverons pas quelques traits de la politique française; parcourons ensuite quelques événements de l'histoire romaine, et le lecteur verra s'il ne s'y trouve point, je ne dis pas une ressemblance, mais une conformité entière avec les événements qui sont arrivés récemment en Europe, et avec ceux dont nous avons fait entrevoir l'aurore. La république des Grecs ne se soutenait que par l'étroite union qui liait les différentes petites républiques ensemble; les villes de Sparte et d'Athènes se distinguaient cependant de toutes les autres; c'étaient elles qui donnaient le branle aux délibérations et aux grandes choses qui s'exécutaient, et les petites républiques n'étaient