<5>le caractère pacifique du cardinal ministre, avaient engagé trop légèrement leur maître dans une affaire de cette conséquence; l'Empereur s'était mêlé lui seul, avec la Russie, et sans la participation de l'Empire, dans les troubles de la Pologne; c'était à lui seul à s'en tirer.

La France, qui, d'un autre côté, avait travaillé avec toute la prudence possible, depuis la mort du duc régent, à rétablir ses affaires dérangées, y avait si bien réussi, que ses finances étaient dans le plus bel ordre du monde, ses magasins pourvus de toutes les choses nécessaires, et ses troupes dans l'état où elle les pouvait désirer. Avec ces avantages, sa situation se trouvait si heureuse, qu'elle se voyait en passe de profiter de tous les événements.

La mort d'Auguste Ier lui fournissait un prétexte spécieux pour se mêler des affaires de la Pologne, et pour exécuter ou bien pour ébaucher les vastes projets que la politique avait conçus et mûrement digérés. La France ne négligea rien : elle prépara les événements, elle se mit en état d'agir avec succès, elle lia ses alliances tant avec l'Espagne qu'avec la Sardaigne; par des pratiques sourdes elle disposa quelques princes d'Allemagne à une espèce de neutralité; elle endormit les puissances maritimes; après quoi elle publia le manifeste de sa conduite, et attaqua l'Empereur, qui était en quelque façon l'agresseur, vu les troubles qu'il avait fomentés en Pologne, et que ses armées étaient prêtes à soutenir, s'il ne s'était vu lui-même assailli.

L'Empereur, qui se voyait sur le point d'être attaqué de tous côtés, remua toutes ses machines pour entraîner l'Empire à courir la même fortune : tous les plus habiles négociateurs furent employés de la part du ministère de Vienne pour inviter l'Empire à déclarer la guerre à la France. Les vues de l'Empereur étaient, premièrement, de tirer du secours de l'Empire; en second lieu, de diviser les forces de la France, qui, l'ayant déjà attaqué en Italie, n'aurait pas manqué de l'y accabler. Il est bon de remarquer en passant que si l'Empire ne s'était point mêlé de cette guerre, elle aurait été plus tôt terminée. L'Empereur aurait perdu en Italie ce que les alliés ont conquis; mais on n'aurait pu démembrer la Lorraine de l'Empire sans donner lieu à de nouvelles brouilleries, et sans exciter un nouvel embrasement.