<7>système au cardinal, tel qu'on le trouve dans ses Mémoires, et que le cardinal, ayant adopté les idées de ce grand homme, aura pris pour principe d'établir une union parfaite et stable entre l'Empereur et la France, à l'imitation du triumvirat d'Auguste, d'Antoine et de Lépide. On sait que ce triumvirat s'était cimenté par des proscriptions. Aussi la France, par le premier article des préliminaires, se trouve-t-elle en possession du duché de Lorraine, démembré de l'Empire.

L'Empereur, pour faire la paix, dépouille son gendre de ses États héréditaires. Le sacrifice paraît assez grand pour exiger, par une espèce de réaction, une reconnaissance proportionnée; mais, pour continuer la comparaison, il est à présumer que la France, avec le temps, jouera le rôle d'Auguste. La simple considération de cet événement aurait peu d'utilité, si elle n'était accompagnée de quelques réflexions que le sujet même fournit. D'abord on voit, par rapport aux Français, un système de politique bien lié, uniforme, et qui ne varie jamais. Lorsqu'ils firent la paix d'Utrecht, leur but était de recommencer la guerre, non tout de suite, à cause que leur réputation était perdue, que leurs finances étaient épuisées, et qu'ils n'avaient pas encore amené les événements au point de maturité qu'ils souhaitaient; mais ils n'en avaient pas moins dans l'esprit d'épier le moment où ils pourraient attaquer l'Empereur avec avantage.

Or, il régnait un préjugé dans le monde, qui portait un préjudice infini aux desseins de la France; ce préjugé désavantageux avait pour fondement une ancienne erreur qui, s'étant perpétuée, n'en acquérait que plus de poids : on se disait tout bas à l'oreille que la France aspirait à la monarchie universelle; en quoi cependant on lui faisait grand tort. Cette seule idée avait arrêté tous les magnifiques projets de Louis XIV, et n'avait pas peu contribué à rabaisser sa puissance; il fallait nécessairement déraciner un préjugé si pernicieux, et en effacer jusqu'à la mémoire.

La fortune qui préside au bonheur de la France, ou, pour parler selon le style des prêtres, l'ange gardien qui veille à son agrandissement, contribua à détruire une opinion si préjudiciable aux intérêts de la France.

Louis XIV, dont l'ambition avait si souvent fait trembler l'Eu-