<148>finances, et vous, messieurs les financiers, voici votre tour. L'auteur, de mauvaise humeur, s'emporte contre les impôts, contre les perceptions des deniers publics, contre les charges que porte le peuple et dont il prétend qu'il est foulé, contre les traitants, contre ceux qui administrent ces revenus, qu'il accuse généralement de malversations, de concussions et de rapines. Cela est très-bien, s'il prouve le fait. Mais comme, en le lisant, je me suis mis en garde contre ses exagérations perpétuelles, je le soupçonne d'outrer infiniment les choses dans l'intention de rendre le gouvernement odieux. Cette épithète de tyran barbare, idée inséparable dans son esprit de celle de la royauté, et qu'il applique, quand il peut, indirectement à son souverain, me rend ses déclamations suspectes de mauvaise foi. Voyons à présent s'il connaît les choses dont il parle, et s'il s'est donné la peine d'examiner l'état de la question. D'où sont venues ces dettes immenses dont la France est chargée? Quelles causes les ont produites? Il est connu qu'une grande partie datent encore du règne de Louis XIV, contractées pendant la guerre de succession, la plus juste de toutes celles que ce monarque avait entreprises. Depuis, le duc d'Orléans, régent du royaume, se flatta de les acquitter au moyen du système que Law lui proposa; mais en outrant ce système, il bouleversa le royaume, et les dettes ne furent acquittées qu'en partie, mais non pas entièrement éteintes. Après la mort du Régent, et sous la sage administration du cardinal de Fleury, le temps consolida quelques anciennes plaies du royaume; mais les guerres qui s'allumèrent depuis obligèrent Louis XV d'en contracter de nouvelles. La bonne foi, le soutien du crédit public, veulent que ces dettes s'acquittent, ou qu'au moins le gouvernement en paye exactement le dividende. Les revenus ordinaires de l'État étant couchés sur le tableau des dépenses courantes, d'où le Roi prendrait-il les sommes nécessaires pour payer le dividende et pour amortir ces dettes, s'il ne les recevait de ses peuples? Et comme un long usage de ce pays a introduit que les perceptions de certaines fermes et de nouveaux impôts passassent par les mains des traitants, le Roi se trouve, en quelque façon, nécessité de se servir de leur ministère. On ne nie point que dans la finance ce nombre de commis et d'employés, peut-être trop