<164>caractère du prince. Lorsqu'il est faible et bigot, les ecclésiastiques prévalent; s'il a le malheur d'être incrédule, les prêtres cabalent contre lui, et, faute de mieux, calomnient et noircissent sa mémoire.
Je passe encore ces petites bévues aux préjugés de l'auteur; mais comment peut-il accuser les rois d'être la cause de la mauvaise éducation de leurs sujets? Il s'imagine que c'est un principe de politique, qu'il vaut mieux qu'un gouvernement commande à des ignorants qu'à une nation éclairée. Cela sent un peu les idées d'un recteur de collége qui, resserré dans un petit cercle de spéculations, ne connaît ni le monde, ni les gouvernements, ni les éléments de la politique. Sans doute que tous les gouvernements des peuples civilisés veillent à l'instruction publique. Que sont donc ces colléges, ces académies, ces universités dont l'Europe fourmille, si ce ne sont pas des établissements destinés à instruire la jeunesse? Mais prétendre que dans un vaste État un prince réponde de l'éducation que chaque père de famille donne à ses enfants, c'est la prétention la plus ridicule que l'on ait jamais formée. Il ne faut pas qu'un souverain fouille dans l'intérieur des familles et qu'il se mêle de ce qui se fait dans les maisons des particuliers, ou il n'en peut résulter que la tyrannie la plus odieuse. Notre philosophe écrit ce qui se présente au bout de sa plume, sans en examiner les conséquences, et il a de l'humeur assurément lorsqu'il qualifie poliment les cours de foyers de la corruption publique; en vérité j'en suis honteux pour la philosophie. Comment peut-on exagérer à ce point? Comment peut-on dire de telles sottises? Un esprit moins véhément, un sage se serait contenté de remarquer que plus les sociétés sont nombreuses, et plus les vices y sont raffinés; plus les passions ont occasion de se déployer, plus elles agissent. On passerait la comparaison du foyer à Juvénal ou à quelque satirique de profession; mais à un philosophe . . . . . je n'en dis pas davantage. Si notre auteur avait été six mois syndic dans la petite ville de Pau dans le Béarn, il apprécierait mieux les hommes qu'il n'apprendra jamais à les connaître par ses vaines spéculations. Comment peut-il s'imaginer que les souverains encouragent leurs sujets au crime, et quel bien leur reviendrait-il de se mettre dans la