<144>déjà assignés,1 afin de s'en servir dans l'exécution de leurs projets, dont la saisie de la Silésie aurait été un des premiers et des plus préjudiciables pour moi et pour mes droits.
Ainsi, je me flatte de l'amitié de Sa Majesté Très Chrétienne et de l'équité de M. le Cardinal qu'ils ne désapprouveront point une démarche, hardie et prompte à la vérité, mais dont l'exécution ne souffrait point de délai, étant devenue nécessaire et indispensable pour ma propre sûreté et celle de mes États.
Mon intention n'est point d'envahir la succession de la maison d'Autriche, et encore moins de troubler la tranquillité de l'Europe et le repos du Corps Germanique.
Mais j'espère que l'on fera attention à mes droits, et qu'on ne trouvera pas injuste, si je me suis pressé à prévenir un troisième dans la possession de ce qui m'appartient préférablement à tout autre.
Vous pouvez en même temps insinuer adroitement à M. le Cardinal que, la France ne perdant rien dans cette affaire, qui peut plutôt convenir à ses véritables intêréts, dans les conjonctures présentes, mieux que quoi que ce puisse être, j'ai tout lieu d'espérer de l'affection de Sa Majesté Très Chrétienne pour moi et pour ma maison, aussi bien que des marques que M. le Cardinal m'a voulu donner, jusqu'ici, de son amitié, qu'on ne voudra point me contrarier dans la poursuite de mes prétentions légitimes. Je me flatte même que la cour de Vienne se rendra flexible et traitable là-dessus, et qu'elle ne se plaindra point d'une démarche à laquelle j'ai été forcé, et qui, au bout de compte, ne lui fait pas plus de mal que ce qu'un autre à ma place était prêt de faire sans avoir les mêmes droits de son côté que j'en ai.
Vous vous servirez de toutes les protestations les plus flatteuses de mon attachement pour le roi de France, et pour le Cardinal ministre, afin d'empêcher qu'on ne se précipite à prendre des résolutions désavantageuses à mon égard, et à vouloir me susciter des embarras, ou même à agir ouvertement contre moi en faveur de la maison d'Autriche, ce qui serait diametralement contraire à la politique et aux véritables intérêts de la France, sur quoi il faut appuyer, autant que vous le trouverez nécessaire, et avoir, en attendant, l'œil au guet sur le parti que la France pourrait prendre contre moi, et les mesures qu'elle voudra concerter avec d'autres puissances pour me barrer ou pour me faire des diversions. Quoique j'aie de la peine à m'imaginer qu'on veuille renoncer en France au vieux système, et laisser perdre une si belle occasion pour affaiblir une maison qui a été, depuis tant de siècles, la rivale la plus formidable de celle de Bourbon. Vous ne manquerez pas de glisser toutes ces réflexions dans les entretiens que vous aurez là-dessus avec le Cardinal, en tâchant de pénétrer comment il pense sur
1 Einem Gerücht zu Folge sollten 12,000 Russen auf dem Marsch nach Sachsen sein.