566. AU MARÉCHAL DE FRANCE COMTE DE BELLE-ISLE A FRANCFORT SUR-LE-MAIN.

Camp de la Neisse, 22 octobre 1741.

Mon cher Maréchal. Vos deux lettres m'ont été très bien rendues, et je ressens une satisfaction entière de l'heureuse réussite de vos négociations, tant au sujet de l'élection de l'électeur de Bavière que par de rapport au traité de Saxe.

Quant à ce dernier point, je vous prie, Monsieur, d'en rejeter toute la faute sur moi, qui me sens assez d'effronterie pour soutenir ma thèse de la banlieue, dussé-je même risquer l'indignation de Son Excellence de Brühl et les anathèmes du père Guarini. Je suis tout résolu, mon cher Maréchal, de m'exposer à ce risque, et je vous prie de ne me point ménager à Dresde, car je serais au désespoir s'il pouvait vous en revenir le moindre chagrin. Dites aux Saxons que je suis opiniâtre, que je me suis mal expliqué envers vous, et en un mot, que d'un mauvais payeur il faut prendre ce que l'on peut, et surtout que, comme je suis actuellement en possession de la totalité de la Silésie, il n'y a que la force majeure ou ma bonne volonté qui puissent mettre les Saxons en possession de ce que je leur voudrais céder de mes conquêtes; en un mot, les Saxons doivent se trouver trop heureux dès qu'ils obtiendront une portion du démembrement de la maison d'Autriche, et s'ils deviennent nos alliés; ce n'est point à eux à nous prescrire la loi, mais à recevoir avec reconnaissance ce qu'on veut bien leur accorder.

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Qu'ils fassent des conquêtes, et qu'un tiers vienne leur en demander une portion: je ne pense pas qu'on les trouve traitables; je le suis fort, car après avoir étouffé tous les justes sujets de ressentiment que j'avais envers eux, je consens même à leur agrandissement et à leur procurer une portion de l'héritage d'Autriche, du double plus forte que l'acquisition que je viens de faire.

Quant à l'électeur de Bavière, je le crois embarrassé d'argent, et je serais capable d'entrer en négociation, si l'affaire de Glatz pouvait se terminer par là, outre qu'en ce cas je renoncerai encore à la seigneurie de Ravenstein.

Je vous prie de me dire votre avis sur tous ces points, et d'être persuadé que je suis avec une estime inviolable et toute l'amitié dont je suis capable, mon cher Maréchal, votre très fidèle ami

Federic.

Monsieur de Neipperg s'est déterminé pour la Moravie. Je saisis la boule au bond, et j'ai volé vers Neisse, tandis que 20 escadrons appesantiront sa marche, et qu'un corps de 10 bataillons et 40 escadrons pénètrent en Bohême pour bloquer Glatz et s'étendre jusqu'à l'Elbe. Neisse est plus forte qu'on ne l'a cru, à cause d'une très bonne inondation qui nous coûte des peines infimes de saigner; actuellement le frais nous a fait quitter les tentes.

Nach Abschrift der Cabinetskanzlei.