6100. AU SECRÉTAIRE MICHELL A LONDRES.
Potsdam, 13 novembre 1753.
J'ai bien reçu à la fois les rapports que vous m'avez faits du 30 d'octobre dernier et du 2 de ce mois, et vous sais parfaitement gré des avis que vous m'avez donnés sur différents sujets qui intéressent mon attention. Cependant, je dois trouver un peu étranges les discours que vous attribuez à quelques-uns des ministres anglais, qui, selon vous, ont été entraînés de donner malgré eux leur consentement au traité à signer avec la Russie, mais qui déclarent à leurs amis que la conduite que j'avais tenue vis-à-vis de la nation, leur avait fermé la bouche et [les avait] obligés à donner tête baissée dans de telles mesures, de sorte que j'aurais été bien aise que vous vous fussiez expliqué plus intelligiblement là-dessus, vu que la conduite que j'ai tenue envers l'Angleterre par rapport à mes différends avec elle, est celle que tout souverain aurait tenue, quand il aurait été dans le cas où je suis relativement à elle, et que je ne trouve rien à changer là-dessus. Aussi, quand les susdits ministres ne voudront point accommoder ces différends par les voies que la France leur proposera, je ne vois plus moyen d'y parvenir.
Au surplus, je serai bien aise que vous sachiez leur faire insinuer adroitement que c'était depuis assez de temps que j'avais confié à la France mon ultimatum par rapport à mon différend avec l'Angleterre,152-1 qu'ils trouveraient bien raisonnable, pourvu qu'ils voulussent s'expliquer<153> avec les ministres français si cela leur accommodait ou non. Que ce n'était proprement moi qui avait choisi de faire notre accommodement par les bons offices de la France, mais que c'étaient les ministres anglais mêmes qui avaient entamé pareille négociation et recherché les bons offices de la France.153-1 Qu'à présent je ne saurais raisonnablement m'en départir, après qu'eux-mêmes avaient cru leur convenir de préférer cette voie à tout autre, et que, si présentement ils y trouvaient de l'inconvenance, c'était bien leur faute. Au reste, vous vous prendrez bien adroitement pour faire ces insinuations là où vous croirez les convenir.
Au reste, il y en a qui m'ont voulu confirmer que ce n'était point du trésor d'Hanovre que le roi d'Angleterre avait fait remettre des sommes à la Russie,153-2 pour l'aider à fortifier ses troupes dans la Livonie, mais bien de la liste civile d'Angleterre dont ce Prince avait fait remettre sous mains des sommes à Riga et Pétersbourg, sur quoi je veux bien attendre vos éclaircissements.
Federic.
Nach dem Concept.
152-1 Vergl. S. 55. 56.
153-1 Vergl. Bd. IX, 386.
153-2 Vergl. S. 106. 140.