6804. AU CONSEILLER PRIVÉ DE LÉGATION HELLMUTH- BURCHARD DE MALTZAHN A STOCKHOLM.
Maltzahn berichtet, Stockholm 13. Mai: „La Reine m'a conté une affaire qui est fort singulière, si elle est vraie. Sa Majesté m'a dit que quelqu'un avait été trouver le comte Frédéric de Gyllenborg, qui fait toutes les manœuvres d'argent à la Diète pour le parti du Sénat, et qu'il lui avait offert des pleins-pouvoirs à acheter 50 écus la pièce; que, le comte Gyllenborg ayant dit qu'il n'avait pas d'argent, l'autre lui avait répliqué que ce canal était ôté à son parti, l'Ambassadeur1 ayant dit que, depuis que la Reine avait assuré qu'il n'y avait rien à craindre pour le système, il n'avait point d'argent à donner, mais que, si la Reine voulait effectuer que la Suède se liât davantage ou plus étroitement avec le roi de Prusse, alors il devait faire son possible pour l'empêcher. La Reine me dit que c'était là à peu près le sens des paroles suédoises qu'il était difficile de rendre littéralement en français. Je fis sentir à Sa Majesté que je regardais cette histoire comme un conte; mais la Reine me dit qu'elle ne savait pas si elle était tout-à-fait à regarder comme tel; qu'elle n'était pas absolument sure qu'elle fut vraie, mais qu'en combinant ce qu'elle venait de me conter, avec d'autres circonstances, elle la trouvait fort vraisemblable. La Reine me rappela a ce sujet ce qu'elle m'avait dit l'été passé d'un discours que le comte Tessin a tenu dans le comité secret, lorsque l'alliance de Votre Majesté avec la Suède venait d'être conclue: ce sénateur doit avoir dit dans ce discours qu'il regardait l'alliance de Votre Majesté comme avantageuse dans ce temps-là, mais qu'il ne pouvait dire si elle le serait dans la suite, puisque Votre Majesté, ayant de puissants voisins, pouvait facilement Se voir attaquée. Je répondis à la Reine que je comprenais plutôt que la Suède pourrait regarder l'alliance de Votre Majesté ne lui Pas être avantageuse, mais que je ne comprendrais jamais que la France fût du même sentiment et voulût empêcher cette alliance.“ | Berlin, 24 mai 1755. Le rapport que vous m'avez fait du 13 de ce mois, m'a été bien rendu. J'applaudis fort à la réponse que vous avez donnée à la Reine, ma sœur, touchant l'affaire qu'elle vous a contée, et ne la regarde moi que comme une nouvelle absolument fausse et grossièrement controuvée que quelqu'un du parti russe, mal au fait des affaires, a voulu inspirer à la Reine, et à laquelle je ne prêterais jamais aucune croyance, dont aussi vous devez tâcher encore de désabuser ma sœur. Au reste, je ne prétends point d'entrer en discussion ici si une alliance avec la Suède m'est réellement d'un aussi grand avantage qu'il paraît qu'on se l'imagine en Suède. Quant à ce que le baron de Hœpken vous a dit par rapport aux ordres donnés au sieur Celsing de rendre service au sieur Rexin, vous l'en remercierez convenablement de ma part; mais j'ai trouvé un peu singulier ce qu'il a ajouté par rapport à la manière dont je devais me conduire pour envoyer quelqu'un à Constantinople, ce qui sent bien de la présomption et comme si l'on croyait que tout le bon-sens était renfermé en Suède, ainsi que vous pourrez dire à ce sujet tout sèchement au baron de Hœpken, si l'occasion s'offre de le faire, que, quand j'envoyais des personnes à des cours étrangères, je |
1 Havrincourt.