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auraient dû prendre dès le départ de leur flotte des arrangements et faire, en même temps, la levée des troupes dont ils avaient besoin; il leur faut bien 100,000 hommes pour mettre les troupes sur le pied où elles ont été à la dernière guerre; je crois, d'ailleurs, qu'il leur aurait convenu de se mettre en état de pouvoir agir d'abord et qu'il aurait fallu d'abord demander à la cour de Vienne si elle voulait accomplir la garantie qu'elle avait promise dans le traité d'Aix-la-Chapelle, et, en cas de refus, la France aurait été assez autorisée de faire entrer ses troupes en Flandre.

En faisant en même temps des convenances au roi de Danemark, il y aurait eu grande espérance qu'on le déterminerait à se concerter sur une invasion dans le pays d'Hanovre.1 Si alors la France envoyait un corps de 30 ou 40,000 hommes par le pays de l'électorat de Cologne, en le faisant passer toujours par les pays de ses alliés, elle pourrait le porter jusqu'au pays d'Hanovre, ayant toujours derrière soi deux bonnes places de ses alliés, savoir Düsseldorf et Wésel. D'un autre côté, la France trouverait encore la Flandre sans défense et pourrait s'emparer de tout ce pays dans une campagne, sans coup férir. Ce pays servirait en tout temps d'équivalent de Canada, et, d'un autre côté, une armée française et danoise qui entrera dans le pays d'Hanovre, forcerait bientôt le roi d'Angleterre à recourir à tous les expédients imaginables pour accélérer la paix. Par ces moyens-là, la France se soutiendrait par ses propres forces, de sorte que, si même elle venait à manquer de l'Espagne, elle pourrait terminer en peu de temps en Europe tous les démêlés qu'elle a avec les Anglais en Amérique, et faire une si bonne compensation à la paix que l'article de ses avantages surpasserait de beaucoup plus ses pertes.

Pour ce qui regarde moi, vous n'avez qu'à parler toujours aux ministres de France de la bonne volonté que j'avais de leur être utile; mais vous leur montrerez en même temps, d'un côté, toutes les forces de la Reine-Impératrice réunies contre moi dans les pays héréditaires, et, d'ailleurs et de l'autre côté, une formidable armée des Russes qui allait s'assembler en Livonie, de sorte que vous les ferez juger eux-mêmes combien ces conjonctures me mettaient dans une inactivité parfaite, jusqu'au moment qu'on puisse les faire changer. Au surplus, ce serait se faire une illusion à pure perte, si les ministres de France inclinaient à croire que leur modération saurait effectuer peut-être qu'on se prêterait en Angleterre à une réparation proportionnée à l'insulte; au moins, mes lettres de Londres2 marquent tout le contraire, portant en propres termes que l'on y continuait à songer de pousser avec toute la vigueur imaginable les armements maritimes contre la France; qu'on y était même surpris que celle-ci tardait à se décider sur une rupture ouverte que sa dignité exigeait dans la situation présente des affaires; qu'on



1 Vergl. S. 228.

2 Bericht Michell's, London 29. Juli.