6959. AU CONSEILLER PRIVÉ DE LÉGATION BARON DE KNYPHAUSEN A PARIS.
Knyphausen berichtet, Compiègne 17. August: „Votre Majesté peut être persuadée qu'on n'exigera rien d'Elle pendant le cours de cette année. Cette décision m'a déterminé à ne point faire usage des insinuations que Votre Majesté me charge par Sa lettre281-2 de faire à M. Rouillé, attendu qu'il me semble que, tant qu'on ne Lui propose rien, il serait non seulement inutile, mais même dangereux d'entrer en explication à ce sujet, ces cordes étant extrêmement délicates à toucher …Quant à ce qui concerne l'offre de la médiation de Votre Majesté,281-3 j'ai présenté cette idée à M. Rouillé et au maréchal de Noailles comme venant de ma part, et ils m'ont paru l'un et l'autre l'avoir extrêmement goûtée.“ | Potsdam, 30 août 1755. Les dépêches que vous m'avez faites du 17 et du 19 de ce mois, me sont heureusement parvenues. La résolution à laquelle vous vous êtes déterminé, à ne pas faire usage des insinuations dont je vous avais chargé pour sieur Rouillé, a été très sage et bonne, de sorte que, vu les raisons que vous en alléguez, je ne puis que l'applaudir parfaitement; car, comme l'on n'a rien exigé de moi, vous n'avez aussi pu mieux faire que de ne leur point faire des difficultés, qui, comme je le comprends parfaitement, auraient eu leurs inconvénients; mais, par ceque les premières lettres que j'avais eues de vous, dès qu'on avait appris l'insulte que l'Angleterre avait faite à la France en Amérique, étaient bien éloignées de m'annoncer autant de modération de la part des ministres de France281-4 comme ils affichent au moment présent, je ne pouvais aussi vous instruire autrement que de la manière que je le fis alors. Pour ce qui regarde l'idée d'une médiation à faire, je me suis imaginé d'abord qu'elle ne serait pas désagréable au ministère de France; mais la grande difficulté est de la faire goûter et approuver aux Anglais, de quoi je doute extrêmement, vu le grand emportement où ils sont encore, et la prodigieuse passion où ils sont encore pour faire la guerre à la France. Quant à l'envoi du duc de Nivernois, je vous sais parfaitement gré d'avoir adroitement profité de la faiblesse de M. de Rouillé et de sa façon de penser sur cet envoi pour lui faire valoir comme une complaisance de ma part ce que j'avais répondu à ce sujet.281-5 Au surplus, je souhaiterais bien de savoir de vous, bien que par un pur motif de |
curiosité, si les ministres de France comprennent à présent combien ils se sont trompés, quand ils m'ont pris autrefois, selon les inspirations que les Autrichiens avec mes autres faux amis et ennemis leur avaient faites, pour un prince remuant qui ne cherchait qu'à brouiller les affaires pour m'agrandir et pour pêcher en eau trouble.282-1 Pour ce qui est des Saxons et du traité que le ministère de France voudra faire avec eux, outre que je crois que leur accord nouveau avec l'Hanovre est déjà fait et conclu,282-2 vous vous donnerez tous les mouvements possibles pour décliner une affaire aussi odieuse que nuisible à la France et à nos intérêts communs; c'est pourquoi aussi vous devez employer tous les arguments que je vous ai déjà communiqués à ce sujet par ma lettre antérieure,282-3 auxquels vous [ajouterez] encore que, si l'on voulait mettre de notre parti les Saxons, je ne saurais y rester, parceque, tôt ou tard, j'aurais à essuyer les malheurs qui en résulteraient. Que, d'ailleurs, ce n'était pas une alliée aussi faible que la Saxe que je demandais, mais bien les deux autres, savoir les Danois et la Porte Ottomane, qui seuls sauraient me rendre les bras libres pour agir,282-4 ce que je ne saurais jamais attendre des Saxons, supposé même qu'ils en eussent toute la bonne volonté. Quant à la confédération que M. de Rouillé estime de pouvoir faire par la Saxe en Pologne, pour empêcher le passage des troupes russiennes par les terres de la République,282-5 vous devez répondre à ce ministre que jamais les troupes de la République ne sauront arrêter une armée de Russie, que tout ce que celles-là feraient, serait un vain effort pour un temps de quinze jours tout à plus, et qui à la suite entraînerait la ruine de la République, sans que j'en aurais retiré le moindre avantage ni secours. Outre tout cela, il faut bien que M. de Rouillé ne se soit pas souvenu de la convention qui a été faite à Varsovie l'année 1744,282-6 en conséquence de laquelle le roi de Pologne s'est engagé envers la Russie de ne mettre aucun obstacle, quand elle voudra faire passer des troupes par le territoire de la République. Au reste, j'ai eu des nouvelles que la cour de Vienne tient prêt un corps de ses troupes de 15,000 hommes pour les faire marcher, le cas le requérant, aux Pays[-Bas].282-7 J'apprends, d'ailleurs, que 20,000 des troupes hanovriennes y doivent marcher encore, dès que le roi d'Angleterre sera reparti pour Londres, à quoi on avait fixé le 8 de septembre. Quant à la république de Hollande, il est incertain encore si le plan projeté de l'augmentation des troupes se réalisera encore ou non.282-8 En attendant, les Anglais font tramer prodigieusement pour la réussite de ce plan, dont on ne peut cependant point encore juger s'il aura lieu ou non. Pour finir, je vous dirai encore que, quant à mon petit différend | |
avec la Suède,283-1 vous insinuerez à M. de Rouillé que je serai content si la France le veut faire aplanir par ses bons offices, quoique toujours à mon honneur et sans que ma dignité en soit blessée, et de manière que les ministres de Suède seront obligés de reconnaître ce pas que je fais, comme un sacrifice que je fais par considération pour la France. J'attends le rapport que vous me faites espérer touchant la vente du polder, et, comme je vous ai d'ailleurs chargé de diverses petites commissions, quand vous fûtes présent à Wésel,283-2 dont vous ne m'avez rien marqué jusqu'à présent, je veux bien vous en souvenir. Federic. |
Nach dem Concept.
281-2 Vergl. Nr. 6904 S. 232.
281-3 Vergl. S. 232. 261..
281-4 Vergl. S. 228.
281-5 Vergl. S. 245.
282-1 Vergl. Bd. VII, 104 Anm.
282-2 Vergl. S. 249. 268.
282-3 Nr. 6918 S. 243.
282-4 Vergl. S. 232.
282-5 Vergl. S. 269. 270.
282-6 Vergl. Bd. III, 117.
282-7 Vergl. S. 280.
282-8 Vergl. S. 236.
283-1 Vergl. S. 258.
283-2 Vergl. S. 208.