7007. AU CONSEILLER PRIVÉ DE LÉGATION BARON DE KNYPHAUSEN A FONTAINEBLEAU.

Charlottenbourg, 30 septembre 1755.

J'ai reçu votre rapport du 19 de ce mois. Je ne veux point vous dissimuler qu'on pense ici presque également qu'en Angleterre sur la conduite du ministère de France et sur son excès de modération; si M. de Rouillé révoque encore en doute l'ordre de l'amirauté anglaise,317-3 il en sera confirmé par l'évènement, comme il en a été à mon grand regret à bien d'autres occasions où je lui ai fait donner des avertissements.

Quant au prétendu sequestre des prises en vaisseaux français qu'on a amenés en Angleterre, le retour du roi d'Angleterre à Londres nous apprendra bientôt le sort de ces vaisseaux, que les Régents n'ont pas voulu prendre sur eux de déclarer pour bonnes prises pendant l'absence du Roi.

Je ne comprends, d'ailleurs, rien dans ce prétendu ménagement qu'on garde relativement à l'Espagne, après que celle-ci a fait déclarer rondement à Londres qu'elle ne voudrait point se mêler des différends présents entre la France et l'Angleterre;317-4 je suis plutôt d'opinion que, si le ministère de France montrait de la fermeté et agissait avec vigueur, en faisant faire quelque coup d'éclat, alors l'Espagne et d'autres alliés de la France feraient des efforts de leur part, au lieu que, voyant que le ministère de France se fait faire toutes les avanies possibles sans remuer, tous aiment mieux de rester tranquilles.

Pour ce qui regarde la médiation de la France pour aplanir les différends que j'ai avec la Suède,317-5 je suis bien aise de vous faire remarquer pour votre direction que je ne vise en tout ceci qu'à flatter la France, afin de pouvoir s'attribuer d'avoir aplani ces différends; car, quant à l'affaire même, il m'est fort indifférent si mes ministres y prennent des audiences publiques ou privées. Vous direz donc en conséquence à M. de Rouillé que je remettais toute cette affaire aux bons<318> offices de la France, et que la seule chose que je prétendais en ceci, était seulement que le baron de Hœpken fût obligé de me faire quelque réparation par rapport aux termes mal ménagés dont il avait usé en me faisant faire par le ministre de Suède ici la déclaration indécente par rapport à l'affaire de Rexin318-1 que vous n'ignorez pas, de sorte que, dès que le baron de Hœpken aura déclaré qu'il avait mal ménagé les termes dont il s'était servi en faisant faire la susdite déclaration, et qu'il m'en aura fait des excuses, le reste sera peu de chose; aussi ajouterezvous qu'ayant fait jusqu'ici le difficile pour ne pas me prêter au nouveau cérémonial de la Suède, j'avais plutôt eu en vue le baron de Hœpken que la cour de Suède.

Quant au sujet de la négociation avec la Saxe pour faire un traité de subsides avec elle, j'espère que les dépêches antérieures que je vous ai faites à ce sujet, vous auront mis assez au fait de ma façon de penser sur cette affaire et de toutes les raisons que j'ai pour persister dans ces sentiments;318-2 au reste, soyez persuadé que ce ne sera pas M. de Rouillé qui rompra cette négociation, mais bien les Saxons euxmêmes, vu qu'ils sont trop entrés avec l'Angleterre, et que tout ce qu'ils font voir d'envie de vouloir conclure avec la France, n'est qu'un jeu du comte de Brühl pour s'en faire un mérite auprès des Anglais et leurs alliés.

Federic.

Nach dem Concept.



317-3 Vergl. S. 293. 313.

317-4 Vergl. S. 288.

317-5 Vergl. S. 308.

318-1 Vergl. S. 176—178.

318-2 Vergl. S. 243. 282. 288.