7165. AU CONSEILLER PRIVÉ DE LÉGATION BARON DE KNYPHAUSEN A PARIS.
Berlin, 30 décembre 1755.
J'ai bien reçu la dépêche que vous m'avez faite du 19 de ce mois, et vous sais parfaitement gré des choses intéressantes que vous y avez marquées pour mon information. Mais, pour ce qui regarde l'idée dont il paraît que les ministres de France restent toujours imbus, comme si je devais me charger de l'attaque du pays d'Hanovre,455-1 je veux bien vous dire pour votre direction qu'en toutes les occasions que vous trouverez convenables, vous devez tâcher de les faire revenir de cette idéelà. Les arguments dont vous vous servirez pour les en désabuser honnêtement, ne sauront point vous manquer, vu que primo mon alliance avec la France n'est que défensive. En second lieu, elle ne regarde que ses possessions européennes et point celles en Amérique, qui cependant ont motivé la guerre qui va s'élever. Tertio, qu'on n'attaque point la France, ni dans la Lorraine, ni dans l'Alsace, ni dans les Pays-Bas. Quarto, le grand risque que je courrai en me prêtant à une opération qui nécessairement m'attirerait sur le corps toutes les forces de la Russie et de l'Autriche, ce qu'on ne saurait prétendre raisonnablement. En cinquième lieu, que mon traité d'alliance expirait le mois de mai qui vient455-2 et par conséquence avant le temps que les opérations de guerre commencent. En sixième lieu, que je ne saurais donc me mêler d'une guerre à laquelle aucun engagement ne m'oblige. Septimo, que, si une guerre du continent commence, les intérêts des parties deviendront beaucoup plus compliqués, au lieu que, si la guerre reste sur le pied qu'elle est présentement, il ne sera pas difficile de rétablir la paix. Et, pour le reste, que, quand même je n'assistais pas la France par des troupes, je lui rendais toujours un grand service en détournant les troupes de Russie et une grande partie de celles de la Reine-Impératrice pour ne pas servir contre la France; ce qui lui donnera une grande facilité, supposé que la guerre par mer ne lui agréera plus, d'agir dans les Pays-Bas avec beaucoup de supériorité. Voilà des arguments tous très bien fondés dont vous pourrez vous servir convenablement dans le cas qu'on remettra sur le tapis l'idée d'une invasion à faire dans l'Hanovre de ma part.
Quant au plan que les ministres méditent pour soutenir les possessions de France en Amérique, je souhaite qu'ils y prennent de bons arrangements, quoique un renfort de 1,500 hommes ne paraît pas être un grand objet, et pour ce qui regarde les nouvelles de Turquie dont M. de Rouillé vous a parlé, quoiqu'un peu mystérieusement, mes vœux sont que la France en retire cette utilité qu'elle s'en promet;455-3 mais, si<456> cela ne consiste que dans quelques déclarations de la part de la Porte,456-1 je crains qu'elles ne fassent guère d'impression sur les deux cours impériales.
Au reste, j'attendrai l'effet des nouvelles instructions que M. de Rouillé a envoyées en Suède au marquis d'Havrincourt pour composer mes différends avec la cour de Suède,456-2 quoique je doute presque que ce ministre effectue qu'on écrive la lettre que M. de Rouillé a fait projeter.456-3
Federic.
Nach dem Concept-
455-1 Vergl. S. 143. 144. 148. 372.
455-2 Vergl. S. 170.
455-3 Rouillé hatte dem Gesandten mitgetheilt, dass die Absetzung des bisherigen Grossveziers (Ali) durch den Marquis von Vergennes bewirkt sei, und dass man sich von dem neuen Grossvezier (Said Effendi) viele Vortheile für Frankreich verspräche.
456-1 Vergl. S. 426.
456-2 Vergl. S. 454.
456-3 Höpken sollte in diesem Schreiben in Betreff der durch Wulfwenstjerna gemachten Vorstellungen erklären: „S'il y était entré de la vivacité, elle devait être regardée comme la mesure de celle qu'il [le roi de Suède] mettait dans son amitié pour Sa Majesté Prussienne et dans la délicatesse avec laquelle il est jaloux de Sa confiance, dont il fait le plus grand cas; mais qu'il n'a jamais eu l'intention de mettre rien dans ces représentations qui fût trop peu amiable, et qu'il désire très sincèrement que Sa Majesté Prussienne en soit persuadée; qu'enfin il espère que, loin que l'amitié qui est établie entre eux sur les liens du sang, de l'inclination et de l'intérêt, en recoive aucun refroidissement, elle n'acquerra que plus de force par cette explication amiable; que Sa Majesté est résolue d'y concourir et qu'elle ne doute pas que Sa Majesté Prussienne ne soit dans les mêmes dispositions.“