„<296> mains du Sénat, un parti gagné à force d'argent et formé par la lie de la nation, persécutant sans ménagement tout ce qui porte un nom et qui connaît son devoir; voilà l'état actuel de la Suède. Voilà la situation où je suis réduite, accablante sans doute, à moins que vous ne l'envisagiez qu'avec cette sensibilité que je vous ai toujours connue pour moi. Si je ne puis réussir à l'intéresser en ma faveur, je saurai supporter avec fermeté tous les revers de la Fortune, et je suis prête à m'exposer à tout ce qui pourra m'arriver, plutôt que de m'abandonner à la discrétion d'un parti insensible aux bienfaits dont je l'ai accablé, et depuis longtemps sourd à la voix de la raison et de l'humanité.“
[Potsdam, 27 avril 1756.]
Dès que j'ai vu la désunion qui commençait à paraître entre le Roi et le Sénat, j'ai cru de travailler au bien commun en tâchant de rapprocher les esprits et en essayant de les conseiller; mais je ne vous ai jamais conseillé de dire votre secret à l'ambassadeur de France ni à personne, au contraire, je crois vous avoir dit plus d'une fois qu'il fallait dissimuler et cacher vos desseins pour les faire réussir. Mais pour vous montrer que vous vous cachez trop peu et que vous vous confiez souvent très légèrement à des personnes qui vous trahissent, je vous envoie l'instruction que vous avez donnée au comte Horn.1 J'ai toutes les autres pièces en main, mais celle-ci vous convaincra que vous ne prenez pas assez de mesures pour cacher vos desseins, et que par conséquent il n'est pas étonnant qu'un sénat jaloux de ses droits, et qui s'est vu à la veille d'être massacré, ne prenne des précautions contre ceux qui en veulent à son autorité et à sa vie. Je ne prends point pour cela la défense du Sénat en main, au contraire, je le blâme d'avoir eu la dureté de placer des gens auprès de votre fils contre votre aveu; j'ai été indigné en apprenant la députation qu'il vous a faite au sujet des diamants de la couronne.2 Il y a plus d'un moyen pour intimider le Sénat et le mettre à la raison; j'agis de ma part, je fais parler à Stockholm et Berlin,3 et si cela ne suffit pas, je ne m'en tiendrai pas là, mais j'agirai plus fortement, et vous verrez que je m'intéresse, plus que vous ne le pensez, à votre personne. Mais vous ne devez pas croire que jamais j'adhère à des voies de fait et à des scènes ensanglantées; je crois que l'ambition a des voies permises pour parvenir à ses fins, et que dans chaque gouvernement il faut s'en tenir aux lois, à moins qu'on ne soit le plus fort, et que rarement la violence est le moyen le plus sûr de réussir. Machiavel dit qu'il faut revêtir la peau de renard, lorsqu'il n'est pas séant de se servir de celle de lion. Je ne vous parle d'ailleurs point du parti du Sénat, que vous traitez de misérables, je ne vois cependant que Wrangel et un homme d'un nom peu connu qui ont été engagés dans la dernière équipée.4 Pour Dieu, pour votre conservation, pour celle de vos
1 Vergl. S. 269.
2 Vergl. Nr. 7461.
3 Vergl. Nr. 7456. 7461 und 7457.
4 Der Baron Erich Wrangel (vergl. S. 245) wurde von der Senatspartei verfolgt, weil er ein Complott gegen die Verfassung angestiftet haben sollte. Die Königin hatte, nach dem Berichte des Grafen Solms' vom 23. März, ihm, dem preussischen Gesandten, darüber gesagt: „Que le crime [du baron Wrangel] n'était pas celui qu'on disait dans le parti dominant, mais uniquement celui d'avoir voulu sauver Silfverhielm. La Reine me disait à cette occasion qu'elle était sûre que le parti avait été dans l'intrigue de le faire sortir de la prison, que leur intention avait été de le prendre dans la maison de Wrangel avec lui, et que je verrai qu'on ne ferait rien ni à lui ni aux bas-officiers arrêtés pour l'avoir laissé échapper.“