Le sieur Mitchell me dit qu'il sentait toute la force et toute la solidité de ce raisonnement et qu'il me priait d'assurer Votre Majesté qu'il avait agité et quasi épuisé cette matière, dans toutes ses lettres depuis plusieurs ordinaires et encore par son courrier d'hier; mais que cela n'empêcherait pas qu'il ne revînt à la charge dès aujourd'hui, et qu'en faisant usage des différentes communications qu'Elle avait eu la bonté de lui faire, il marquerait au lord Holdernesse que Votre Majesté avait pensé à eux au milieu de Son camp de Magdebourg, qu'Elle pensait mieux pour eux qu'ils ne faisaient eux-mêmes, et qu'ainsi il les conjurait d'y songer sérieusement à leur tour et de lui donner des instructions détaillées sur les objets intéressants dont il s'agissait, afin qu'il pût satisfaire Votre Majesté sur tous les points et dans tous les cas qui pourraient arriver. Il ajouta que, comme Votre Majesté voulait bien le laisser le maître de faire usage ou non d'une certaine insinuation à faire en Russie,1 il croyait qu'il ne fallait pas l'hasarder à présent, mais qu'il ne la perdrait pas de vue, pour en tirer parti dans le premier moment favorable qui se présenterait. Il me pria de remercier très humblement Votre Majesté des avis qu'Elle avait eu la bonté de lui communiquer sur les desseins de la France contre les îles britanniques;2 avis qu'il ferait valoir comme une marque bien signalée de Son amitié, et qu'il La pouvait assurer d'avance de la reconnaissance de son maître et de sa nation. Enfin, en parcourant avec moi le tableau de l'Europe, il me chargea aussi d'assurer Votre Majesté que tous les bruits que les Autrichiens et les Français faisaient courir au sujet de l'Espagne, étaient destitués de fondement, que le sieur Keene, qui était un habile homme, mandait encore par ses dernières lettres qu'on pouvait compter sur cette cour, et qu'il y ajoutait d'autant plus de foi qu'il n'était pas de l'intérêt de l'Espagne d'abandonner l'Angleterre, tant que la France avait la supériorité, et que Minorque n'était d'ailleurs pas un assez grand objet pour la tenter.“
Finckenstein berichtet, Berlin 20. Juni, dass er dem grossbritannischen Minister die durch Erlass vom 19. Juni3 ihm aufgetragenen Mittheilungen gemacht hat: „Je lui répétai l'article de la flotte et lui fis sentir combien il importait à Votre Majesté de savoir à quoi S'en tenir et sur quel secours Elle pouvait compter de la part de l'Angleterre, en cas de besoin. Il me répondit qu'il espérait d'être dans peu en état de dire quelque chose de positif et de satisfaisant à Votre Majesté sur ce sujet. Je dis, enfin, au sieur Mitchell que Votre Majesté S'était souvenue à cette occasion de la réponse piquante que l'Impératrice-Reine avait faite au sieur Keith, lorsqu'il lui avait communiqué la convention de neutralité; que tout ce qui se brassait aujourd'hui, fournissait la solution de cette énigme, qui n'avait voulu dire autre chose sinon qu'on taillerait une si belle besogne à Votre Majesté du côté de la Russie qu'Elle ne serait pas en état de secourir le pays d'Hanovre, lorsque la France voudrait l'attaquer; et qu'Elle avait toutes les raisons du monde de croire qu'il s'agissait, dans le cas de cette attaque, d'un concert entre la France, la cour de Vienne et la Russie, pour La tenir en échec par de puissantes armées du côté de la Prusse et de la Silésie, et pour engager même la Russie de Lui faire quelque déclaration menaçante, pour L'empêcher d'assister le roi d'Angleterre. Le sieur Mitchell m'avoua que ce plan lui paraissait très probable, et je n'ai pas eu de peine non plus à le faire convenir de la conséquence qui en résultait, et de la nécessité qu'il y avait de tâcher dans une conjoncture si critique de gagner le plus d'amis qu'on pourrait, et surtout les Turcs et les Danois, s'il y avait la moindre possibilité à y réussir.“
Potsdam, 21 juin 1756.
J'ai vu avec satisfaction tout ce que vous m'avez marqué par votre rapport du 19 de ce mois au sujet du dernier entretien que vous avez eu avec le sieur Mitchell, et de la façon dont il s'est expliqué sur la conjoncture présente des affaires.
1 Vergl. S. 408. 417.
2 Vergl. S. 418.
3 Vergl. Nr. 7582 S. 428.