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faire un traité de neutralité des Pays-Bas ou s'arranger avec la cour de Vienne pour qu'elle ne s'oppose pas, quand ils voudraient faire une démonstration contre le pays d'Hanovre. Cependant, comme il n'est pas possible que le comte de Starhemberg puisse avoir déjà des instructions et des ordres de sa cour relativement à l'un ou l'autre des susdits sujets, ce ne sauront être que de simples ouvertures que les ministres de France lui feraient, supposé qu'il y en ait quelque chose. Enfin, il ne saura guère manquer que je sois bientôt éclairci sur les intentions de la France; car, si les ministres refusent de renouveler le traité avec moi, cela me servira de boussole qu'ils veulent prendre parti ailleurs, et dans ce cas-là il faut bien que je prenne mes mesures en conséquence.

Au surplus, quand vous parlerez au sieur de Rouillé, vous observerez avec attention si la douceur dont il s'exprimera envers vous, sera réelle ou affectée. Je vous recommande encore comme une chose très nécessaire pour mon service dans ces occurences de bien flatter Madame de Pompadour,1 afin de vous la rendre favorable, et de lui insinuer, s'il est possible, que plus la guerre deviendra générale et compliquée, plus il serait difficile de la terminer, et que rien empêcherait que je ne saurais être le porteur des paroles de paix,2 ce que je remets cependant à votre discernement.

J'ai oublié de vous dire en haut que, quand M. de Rouillé voudra vous objecter encore qu'au moins par ma convention faite avec le roi d'Angleterre je lui procurais indirectement la facilité de pouvoir faire passer les troupes que l'Angleterre avait à sa solde, dans les îles britanniques, vous lui direz que le roi d'Angleterre n'eût pas moins fait passer ces troupes en Angleterre, quand même la convention n'aurait jamais existé, vu qu'il aurait eu toujours les troupes de Russie à sa disposition pour en couvrir ses États d'Hanovre.

Federic.

Voici une occasion où vous me pouvez donner des preuves éclatantes de votre capacité. Il faut faire jouer toutes sortes de ressorts pour découvrir si une démarche très innocente de ma part leur a donné plus que de l'humeur contre moi. Si ce n'est qu'une boutade passagère, comme il leur arrive d'en avoir, je puis renouveler le traité avec eux; mais s'il y a un levain caché dans le fond de leur cœur, cela m'obligera à prendre des mesures toutes différentes. Pour moi, je suis persuadé qu'ils ne trouveront que de belles paroles à Vienne, mais rien de plus, et que, lorsqu'ils verront qu'ils ne peuvent pas trouver des gens qui se sacrifient pour eux, ils seront bien aises de renouer avec moi, de même qu'avec l'Espagne, et qu'ils ne trouveront plus étrange que ni les uns ni les autres n'aient voulu se mêler de la guerre des merluches. Tâchez de flatter la Pompadour pour voir si peut-être elle



1 Vergl. S. 73.

2 Vergl. S. 37. 38.