7328. AU SECRÉTAIRE MICHELL A LONDRES.

Potsdam, 6 mars 1756.

Le rapport que vous m'avez fait du 20 de février, m'a été rendu. Je vous ai déjà informé par mes précédentes lettres des avis qui me sont parvenus d'un chipotage secret entre la France et la cour de Vienne, et de ce que, selon toutes les apparences, la dernière voudra chercher de détacher la Russie de l'Angleterre et de l'entraîner dans son parti, afin que vous en avertissiez milord Holdernesse.172-2 A présent, je veux bien que vous parliez encore à ce ministre, pour lui dire confidemment de ma part que j'avais eu de bons avis que non seulement la cour de Vienne avait dépêché un courrier à Pétersbourg,172-3 mais qu'elle avait résolu d'y renvoyer le général Pretlack, qui a eu ordre de se tenir prêt à ce voyage.172-4 Vous ajouterez que je venais d'être informé par des lettres de la plus fraîche date172-5 que l'impératrice de Russie n'avait point encore ratifié le traité de subsides avec l'Angleterre, malgré tous les mouvements que le chevalier Williams s'était donnés, et la mauvaise humeur qu'il en avait marquée et sur les irrésolutions de l'Impératrice, et que tout avait été sans succès; qu'il paraissait même, par quelques discours qui étaient échappés à la Czarine envers ses confidents, qu'elle hésiterait longtemps, avant que de signer sa ratification, et qu'en partie les scrupules ne lui provenaient que de ce qu'on avait inséré à Londres dans les gazettes avant la ratification tout<173> le traité, ce qui avait donné lieu à quelques courtisans de critiquer les démarches du ministère russien et de faire parvenir ses commentaires frivoles à l'Impératrice.

Vous continuerez par dire à milord Holdernesse que je croyais ainsi que le ministère anglais n'aurait plus un moment à perdre pour prendre ses mesures, afin que, si la Reine-Impératrice lui échappait, celle-ci ne sût pas entraîner aussi la Russie, vu qu'alors la partie deviendrait trop forte contre nous et la balance emportée, de sorte que, selon moi, le susdit ministère aurait à employer toute sa vigilance pour faire échouer des projets aussi embarrassants que pernicieux; que c'étaient mes idées et que j'estimais d'ailleurs que, supposé que l'Impératrice ne voulût du tout ratifier le traité de subsides, qu'il faudrait nonobstant cela que le ministère anglais employât tout pour empêcher au moins que la Russie ne s'engageât avec la cour de Vienne. Qu'au reste on disait à présent tout publiquement à Vienne que la Reine-Impératrice prendrait des liaisons avec la France.173-1

Il y a trois jours qu'un courrier anglais est venu passer ici pour aller en Angleterre; j'ai bien voulu vous en avertir, afin que vous mettiez tout en œuvre pour savoir le contenu des dépêches qu'il y aura apportées, afin de m'en informer exactement au plus tôt possible.

Federic.

Nach dem Concept.



172-2 Vergl. S. 131. 144. 152. 167.

172-3 Bericht Klinggräffen's, Wien 19. Februar.

172-4 Bericht Klinggräffen's, Wien 25. Februar.

172-5 Bericht Maltzahn's, Dresden 27. Februar, auf Grund eines Berichtes Funcke's an Brühl, Petersburg 26. Januar.

173-1 Bericht Klinggräffen's, Wien 21. Februar. Vergl. Nr. 7318.