7405. AU CONSEILLER PRIVÉ DE LÉGATION COMTE DE SOLMS A STOCKHOLM.
Solms berichtet, Stockholm 23. März, über eine Unterredung, welche die Königin von Schweden ihm am 22. März gewährt hat: „Elle me dit qu'elle était fâchée d'avoir jamais fait un pas en avant pour se raccommoder [avec le Sénat], puisque les entretiens qu'elle avait eus pour cet effet avec le marquis d'Havrincour245-1 et qu'il avait indignement trahis, étaient une des raisons de son malheur présent“ … La Reine ajouta „qu'elle n'avait absolument point de plan formé à présent et qu'il était aussi inutile d'en faire, puisqu'elle n'avait point d'argent pour l'exécuter, et que, faute de pouvoir par ce moyen-là remettre les choses dans l'équilibre, elle était obligée de les laisser aller, dans l'espérance que le Sénat se briserait à la fin la tête à force de pousser. Sa Majesté fit à cette occasion une comparaison entre son sort et celui du malheureux roi Charles 1er en Angleterre; elle me dit qu'elle ne doutait pas que, si le Cromwell de Suède — c'était le comte Tessin — pouvait y parvenir, il jouerait volontiers la même tragédie en ce pays-ci. Après avoir longtemps parlé sur cette affaire, et moi, de mon côté, ayant fait tout au monde pour lui faire oublier ces idées, elle me dit enfin que je ne devais pas m'étonner, si je lui trouvais tant de noir dans son esprit, mais que, dans la situation où elle était à présent, elle avait peur de son ombre, et remettant ensuite le discours sur les moyens de changer son sort, elle me donna à entendre que son projet était d'attendre quelque évènement, soit au dehors, soit dans le pays même. Quant au premier point, elle croyait que les événements qui arriveraient à présent en Europe, influeraient aussi sur la Suède, si la guerre se faisait entre l'Angleterre et la France, que, si celle-ci fût battue et qu'elle eût besoin alors elle-même d'argent, elle ne pourrait plus en donner pour soutenir son parti, ou que, si Votre Majesté pouvait faire entrer la Suède dans l'alliance qu'Elle venait de contracter avec l'Angleterre, cela hausserait beaucoup les actions de la cour; qu'il fallait attendre ensuite si la Russie ne voudrait pas profiter de ces troubles intérieurs pour enlever la Finlande à la Suède, puisqu'en ce cas-là la pensée de la guerre étoufferait celle des cabales. Le dernier projet enfin, et c'est celui à qui la Reine donna la préférence, était si Votre Majesté voulait prendre ouvertement le parti de la cour et faire faire ici des déclarations que, si on ne faisait pas de satisfaction au roi de Suède, Elle regarderait l'offense qu'on faisait à Son allié, comme faite à Elle-même. Pour ce qui est des évènements qui pourraient arriver dans le pays même, la Reine ne s'expliqua pas ouvertement, mais je pouvais assez comprendre qu'elle voulait parler de révolution générale, à laquelle elle protestait qu'elle n'aurait point de part, mais qu'elle croyait qu'elle pourrait arriver, puisque dans toutes les provinces on gémissait de l'oppression du Sénat; que la peur de la Commission les retenait encore, mais que cette même Commission en allant toujours plus loin, pourrait pourtant à la fin y donner occasion; qu'elle jouait gros jeu, si le coup manquait, et que c'était pour cela qu'elle ne ferait rien pour le prématurer, puisqu'il y allait de sa tête, mais si on poussait les choses à mort, qu'elle la risquerait volontiers, puisqu'elle n'avait plus que cela à perdre.
Die Königin hat dem Gesandten weiter mitgetheilt, dass einer ihrer ergebensten Anhänger, der Baron Wrangel, das Land verlassen hat und wahrscheinlich nach Berlin kommen wird. „Qu'elle priait Votre Majesté de le prendre sous Sa protection et que, comme il était le mieux informé de tout ce qui s'était fait ici, il serait en état de<246> faire mettre Votre Majesté au fait de tout ce qu'Elle désirerait de savoir … Outre celui-ci, elle Lui recommande encore deux jeunes gentilshommes de belle figure,246-1 qui avaient été dans les trabants et qui avaient pris le parti d'abandonner leur patrie.“
Potsdam, 6 avril 1756.
J'ai reçu la dépêche que vous m'avez faite du 23 de mars, et vous renvoie, touchant la lettre que le baron de Hœpken. a écrite selon le modèle convenu246-2 au marquis d'Havrincour, aux instructions que mes ministres du département des affaires vous feront par rapport à vos audiences à prendre présentement.246-3
Quant au rapport que vous m'avez fait du dernier entretien que ma sœur, la Reine, a eu avec vous, je vous dirai que je suis extrêmement fâché de la situation violente où elle se trouve, et de la résolution qu'elle vous a fait paraître de pousser les choses à la dernière extrémité; c'est pourquoi vous tâcherez de lui parler au plus tôt mieux, pour lui dire de ma part qu'il m'était impossible d'approuver les voies violentes dont elle s'était servie jusqu'ici et songeait de vouloir encore s'en servir; que je la conjurais de se prêter sagement aux conjonctures et d'agir avec modération, conformément à ce que je lui avais écrit dans ma dernière lettre que je vous ai adressée,246-4 et que, pourvu que j'apprendrais qu'elle voudrait agir avec modération, je m'employerais à moyenner une médiation entre la cour et le Sénat, mais que j'étais aussi obligé de lui dire qu'au cas qu'elle ne voudrait point entendre parler d'une réconciliation, mais plutôt continuer dans des mesures violentes, je ne serais alors point à même de me mêler de ces affaires, mais de les abandonner simplement. Ce que vous lui direz tout modestement, mais de manière à lui faire bien entendre mes intentions à cet égard. Vous lui direz, d'ailleurs, que, quant au sieur Wrangel et aux deux autres gentilshommes suédois qu'elle avait recommandés à mes soins, je voudrais leur accorder un asile dans mes États, mais qu'il ne me conviendrait pas de leur donner une protection ouverte.
Au surplus, dès que vous aurez eu vos audiences publiques, vous devez dire de ma part au baron de Hœpken que je voudrais bien mettre dans un parfait oubli tout ce qui s'était passé à l'égard de la grossièreté dont on avait usé envers moi,246-5 mais que je le priais fort de ne pas pousser trop loin les affaires contre ma sœur, la Reine, pour ne pas m'obliger contre mon gré d'y prendre plus de part que je n'avais fait jusqu'ici.
Vous parlerez d'ailleurs à M. d'Havrincour pour lui dire que je<247> voudrais bien employer ma médiation pour aplanir au gré de sa cour les différends élevés entre la cour de Suède et le Sénat, à quoi vous ajouterez une menace sourde et en termes bien mesurés et modérés, afin de lui faire entrevoir seulement que, pourvu que le Sénat pousserait trop loin ses mesures contre la cour, il se trouverait des moyens pour le faire raviser auxquels le Sénat ne pensait pas peut-être présentement.
Federic.
Nach dem Concept.
245-1 Vergl. Bd. XI, 57—59. 67. 68. 89. 90.
246-1 Hermelin und Hegge.
246-2 Vergl. S. 80. 81.
246-3 Ministerialerlass, d. d. Berlin 6, April (abgegangen am 10. April; vergl. S. 249): „Dès qu'on vous aura accordé les audiences, vous ne manquerez pas de les prendre en conséquence de la nouvelle étiquette établie à la cour de Suède, ponctuellement sur le même pied et de la mênie manière que le baron d'Asseburg, ministre de Danemark, les a eues à son arrivée à Stockholm.“ Vergl. Bd. XI, 71.
246-4 Vergl. Nr. 7390 S. 231.
246-5 Vergl. Bd. XI, 176—178. 196.