<160> apparence, ce coup décide de la guerre et me met en état de pousser avec la plus grande vivacité mes opérations contre les Français.
L'on me mande de Prusse que l'on s'attend à tout moment à l'invasion des Russes, que leurs vaisseaux de guerre croisaient déjà devant les ports de ce royaume.1 Si cela devient sérieux, je serai obligé peut-être d'envoyer quelque secours au maréchal Lehwaldt qui commande là-bas, ce qui m'affaiblira d'un autre côté.
Enfin, je suis plein d'espérance, et je ne doute point que nous ne nous tirions d'affaire malgré la haine, l'animosité et l'ingratitude de nos ennemis, mais il faut perdre du temps à propos et regagner ensuite ce temps en d'autres occasions par la vigilance et l'activité. Je suis avec les sentiments de la plus haute estime, Monsieur mon Frère, de Votre Majesté le bon frère
Federic.
Nach der Ausfertigung im Königl. Staatsarchiv zu Hannover. Eigenhändig.
9086. AU MINISTRE D'ÉTAT COMTE DE PODEWILS A BERLIN.
Au Camp de Prague, 11 juin 1757.
Mon cher Podewils. Pour vous répondre à ce que vous m'avez marqué, par votre rapport du 7 de ce mois, des dernières lettres qui vous sont parvenues du baron Münchhausen, je suis bien aise que vous sachiez que Prague ne tiendra pas si longtemps que les Autrichiens prétendent ou tâchent plutôt de le faire accroire au public. Ce sera tout au plus quatre semaines encore que la garnison pourra subsister des magasins qu'il y a, et peut-être en faudra-t-il rabattre encore ce que nos bombes leur en ont brûlé, ce qui apparemment est assez considérable, vu que, selon tous nos avis, l'on a déjà commencé à diminuer les portions ordinaires qu'on donne au soldat, et que, pour tous les autres vivres, on en manque absolument, en sorte qu'on est réduit à tuer les chevaux de la cavalerie, pour en vendre la chair aux soldats.
Quant à l'armée du comte Leopold Daun, qui n'est forte jusques à présent que de 33,000 hommes à peu près, comme elle a été forcée de se retirer sur Teutsch-Brod, j'espère que nous l'obligerons à abandonner entièrement la Bohême.
Pour ce qui regarde la marche prétendue des Français par le pays de Würtemberg, vous m'en laisserez le soin, et assurément ils n'avanceront guère dans l'Empire. D'ailleurs, je voudrais bien répondre que, quelque fierté et hauteur que la cour de Vienne a affectées au dehors, elle ne voudra pas risquer d'en venir à des procédures formelles dont elle menace l'Hanovre et ses alliés. Pourvu que l'on prenne patience pour quatre semaines, j'espère que les choses auront pris alors une tournure bien plus favorable pour nous, et si le Ciel bénit nos armes, il pourra bien arriver que la présente année n'aura pas fini que la Reine-
1 Vergl. S. 161. 163.