Qu'il lui avait été enjoint, de plus, de rendre compte à Votre Majesté des mouvements qu'on s'était donnés, et qu'on se donnait encore à Constantinople, pour animer la Porte Ottomane a une levée de bouclier;1 qu'il n'y avait pas moyen, à la vérité, de juger avec quelque certitude du succès de cette négociation, puisqu'il s'agissait d'un pays éloigné et sujet à des changements continuels, mais que, le sieur Porter ayant marqué, il y a environ six semaines, que les Turcs ne paraissaient pas contents des deux cours impériales, on lui avait ordonné de profiter de cette disposition pour parvenir à son but, et qu'on lui avait envoyé une lettre de crédit très considérable, comme le meilleur moyen de traiter et de faire réussir les affaires dans ce pays oriental.
Qu'il devait aussi avoir l'honneur de dire à Votre Majesté que, par les mesures qu'on avait prises en Amérique, on avait lieu de se promettre les succès les plus éclatants et une campagne des plus brillantes, et qu'il y avait tout à parier qu'on se rendrait maître du Cap Breton, ou qu'on ferait quelque autre coup d'éclat qui en imposerait à la France et lui ferait sentir la nécessité de songer à la paix.
Qu'il était chargé en particulier de la part du roi d'Angleterre de marquer à Votre Majesté sa vive reconnaissance et de Lui dire qu'il n'oublierait jamais ce qu'Elle avait fait pour lui en lui accordant le prince Ferdinand pour général de son armée, en l'assistant de Ses conseils et en lui fournissant un secours de Ses propres troupes;2 qu'il sentait bien que c'était à elles seules qu'il était redevable de3 la délivrance de ses Etats électoraux, et qu'en revanche Elle pourrait compter sur lui dans toutes les occasions qui se présenteraient.
Le sieur Yorke ajouta que ce Prince était effectivement si pénétré de la manière dont Votre Majesté en avait agi à son égard qu'il n'en parlait jamais qu'avec une sorte d'extase, et que, le voyant dans ces sentiments dont il pouvait garantir la sincérité, il en avait profité pour lui proposer une question que personne n'avait osé lui faire jusqu'ici, et sur laquelle il avait cependant cru devoir s'éclaircir, avant que de se rendre auprès de Votre Majesté, pour couper court à toutes les difficultés et à toutes les chicanes que la délicatesse pointilleuse du ministère hanovrien pourrait imaginer; qu'il lui avait donc dit que, le cas pouvant arriver que le comte de Clermont, après avoir passé le Rhin et avoir reçu ses renforts, se contentât de faire une guerre défensive de ce côté-là et envoyât un détachement considérable pour agir contre Votre Majesté, soit en Bohême soit du côté de la Thuringe, il serait bien aise de savoir si, dans ce cas, Sa Majesté Britannique voudrait que toute son armée restât rassemblée du côté du Rhin, ou si elle ne permettrait pas qu'on fît alors aussi un détachement proportionné aux forces de cette armée, pour agir en faveur de Votre Majesté, et du côté où Elle le trouverait nécessaire? Sur quoi, ce Prince lui avait répondu, sans hésiter, qu'il en était content, qu'il l'avait même remercié de lui en avoir fait naître l'idée, et lui avait ordonné de déclarer à Votre Majesté qu'Elle pouvait disposer de ses troupes et donner Ses ordres au prince Ferdinand, de la manière qui Lui paraîtrait la plus convenable dans tous les cas qui pourraient survenir.
Enfin, le sieur Yorke m'a parlé du rappel du sieur Mitchell comme d'une chose qui était résolue,4 et qui lui faisait de la peine, mais qui pourrait encore être redressée, si Votre Majesté désirait de conserver ce ministre; qu'il était en partie cause lui-même de cette résolution, pour avoir écrit de certaines vérités un peu trop durement, ce qui avait personnellement offensé le sieur Pitt, qui était le seul du ministère qui avait insisté sur son rappel; que le roi d'Angleterre était persuadé qu'on lui faisait tort, et serait charmé qu'il restât; qu'en attendant on lui avait donné ordre de demander à Votre Majesté si Elle agréerait le retour de milord Hyndford,5 mais qu'il était persuadé que cette affaire dépendrait en dernier ressort de Votre Majesté et de la manière dont Elle jugerait à propos de S'intéresser en faveur du sieur Mitchell.
1 Vergl. S. 160. 237. 261. 351.
2 Vergl. S. 293. 339.
3 Vorlage „à la délivrance“ .
4 Vergl. S. 312. 338.
5 Hyndford war vom Frühjahr 1741 bis zum Herbst 1744 englischer Gesandter in Berlin gewesen. Vergl. Bd. I, 219; III, 311.