<417>suadé que je ne manquerai de réfléchir sur ce que vous venez de m'expliquer, et tâcher de contenter Votre Altesse d'une façon ou d'autre. Je sais la part véritable que vous prenez à tout ce qui regarde mes intérêts, et la félicitation qu'en conséquence vous me faites sur la levée du siège de Neisse, que mes ennemis ont été obligés de faire, et sur la fin assez heureuse de ma campagne passée, me cause un plaisir d'autant plus sensible qu'elle me vient d'un ami que je compte toujours comme le meilleur. Vous serez assuré du parfait réciproque de ma part et des sentiments de considération et d'estime invariables etc.
Federic.
Nach dem Concept.
10587. AU LORD-MARÉCHAL D'ÉCOSSE.
Dresde, 8 décembre 1758.
Sans déchirer encore nos blessures, mon cher Milord, en y portant une main indiscrète, je passe le sujet de nos afflictions et de nos larmes,1 pour en venir à votre voyage d'Espagne.2 Je reconnais en cela les marques de votre amitié et le désir que vous avez à servir un État que votre ami gouverne. Je fournirai à la somme que vous exigez pour votre voyage. Il sera difficile de vous donner des instructions, on ne sait pas même certainement si l'Espagne voudra prendre sur elle la médiation de la paix. En cas que cela soit, vous êtes persuadé d'avance que j'aimerais mieux mourir mille fois que de consentir à des conditions de paix flétrissantes pour la Prusse; que peut-être on pourrait même tirer quelques avantages d'un accommodement, et comme c'est un préalable de captiver la faveur des médiateurs, personne que vous n'est plus fait à se faire aimer et à rendre respectable et aimable la cour qui vous emploie. Je ne peux vous donner des instructions précises, avant que nos ennemis ne commencent à parler, ou que les organes par lesquels ils veulent communiquer leurs intentions, ne nous les expliquent.
Vous m'apprenez que mes ennemis me calomnient jusqu'à l'Escurial. J'y suis accoutumé, je n'entends que mensonges répandus sur mon sujet. Je ne suis presque nourri que d'infâmes satires et que d'impostures grossières que la haine et l'animosité ne cessent de publier en Europe. Mais on s'accoutume a tout. Louis XIV devait être à la fin aussi dégoûté et rassasié des flatteries dont il avait sans cesse les oreilles pleines, que je le suis de tout le mal qu'on dit de moi. Ce sont des armes indignes que les grands princes ne devraient jamais employer contre leurs égaux, c'est se dégrader mutuellement et apprendre au public à rire de ce que l'intérêt des princes devrait lui rendre respectable. Qu'importe ces petites humiliations de l'amour propre, nos ennemis nous font souvent du bien en nous persécutant —
Au Cid persécuté Cinna doit sa naissance.3
1 Vergl. S. 398.
2 Vergl. S. 415.
3 Boileau, Épitre VII, à Racine, Vers 62. Vergl. auch Anm. 1. S. 274 in Bd. XX der Œuvres de Frédéric le Grand.