9988. A LA MARGRAVE DE BAIREUTH A BAIREUTH.

Littau, 10 mai 1758.

Ma très chère Sœur. Je dirai, comme Cicéron:10-1

Les Dieux sont pour César, mais Caton suit Pompée; vous, la justice et la bonne cause ce sont des synonymes; votre bienveillance me portera plus de fortune que le stoique républicain n'en porta au parti du Sénat. Déjà, j'ose vous assurer qu'il y a plus d'un projet de dérangé chez l'ennemi. Nous mangeons actuellement du gruau préparé pour les Oursomanes; ce n'est pas le tout, mais c'est un bon commencement. Daun marche à Brünn, nous sommes déjà maîtres des environs d'Olmütz, le reste viendra malgré la Vierge que tant de P :10-2 implorent, et maigre Moïse, que cet empereur juif,10-3 qui le croit mettre de son parti, invoque. Je n'adresse mes vœux qu'à vous; vous êtes ma Minerve et mon égide, je me crois fort de votre assistance; votre amitié m'est plus précieuse que le secours de tous les Saints du paradis.

Je suis charmé de ce que notre neveu10-4 enfile une bonne route; dans son âge, c'est beaucoup de bien débuter. Il faut espérer que le sang maternel10-5 fera le reste.

Je ne vous parle point des brigands qui vous ont environnée,10-6 j'ai un certain pressentiment que je renferme en moi-même, qui me fait croire que cet essaim disparaîtra subitement.

Enfin, ma chère sœur, quoi que nous en ayons, il faut encore courir cette année la carrière épineuse des grands évènements et s'étourdir sur toutes les vicissitudes que contient le chapitre des incidents, dont nous avons fait l'année précédente une si cruelle expérience. Je ne renonce pas encore à l'espérance de vous voir, de vous entendre et de vous admirer. Je dois vous avertir que, pendant trois semaines, nous levons la chaîne de notre communication avec la Silésie, mais que cela ne vous cause aucune sorte d'inquiétude! Vous serez instruite de tous les évènements intéressants, mais non pas des détails d'un siège, ni des campements dont les minuties ne méritent pas votre attention. Je suis avec la plus tendre reconnaissance, ma très chère sœur, votre très fidèle frère et serviteur

Federic.

Nach der Ausfertigung. Eigenhändig.

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10-1 Die Worte stammen aus: Lucanus, Pharsalia I, 128. Die gleiche Verwechslung mit Cicero vergl. Bd. XIV, 382.

10-2 So in der Vorlage.

10-3 Vergl. Bd. XIV, 427 und Œuvres IV, 8.

10-4 Der junge Markgraf Karl Alexander von Ansbach suchte gute Beziehungen zu seinem Oheim, dem Könige von Preussen, herzustellen. (Vergl. Nr. 9989. und Bd. XV, 144.375.) Der verstorbene Markgraf hatte sich der österreichischen Partei angeschlossen und dadurch einen heftigen Zwist mit seinem Schwager hervorgerufen. Vergl. Bd. XIV, 206. 315—317; XV, 144. 158.

10-5 Die verwittwete Markgräfin von Ansbach, Friederike Luise, die Mutter des regierenden Markgrafen, war die Schwester des Königs und der Baireuther Markgräfin.

10-6 Die Einquartierung österreichischer und Reichstruppen in der Markgrafschaft Baireuth.