Je crois que j'ai deviné l'article que vous avez barré dans votre lettre. On dit le roi d'Espagne malade de corps et d'esprit, prêt à abdiquer et prêt à descendre au tombeau.1 Vous jugez dans quelle situation cette crise jette les personnes attachées au gouvernement. On parle de Don Carlos; on croit qu'il veut avoir l'Espagne et garder le royaume de Naples. Il a raison, mais d'autres ne l'entendent pas ainsi; ceux qui veulent percer dans l'avenir, croient que tout ce brouillamini pourrait mener à une guerre en Italie,2 au moins brouiller ces deux chers amis qui se tendent la main pour m'assassiner très chrétiennement et très apostoliquement. Mais ce n'est pas de quoi je m'embarrasse; je n'ai que mon épée et ma juste cause pour moi, et je me persuade que ce hasard qui fait éclore des évènements si extraordinaires, en amènera peut-être quelqu'un d'heureux; et, si cela n'arrive pas, il faut également prendre son parti.
Adieu, mon cher milord, je vous embrasse de tout mon cœur.
Federic.
Nach der Ausfertigung. Eigenhändig.
10637. AU LIEUTENANT-GÉNÉRAL COMTE DE SCHMETTAU A DRESDE.
Breslau, 4 janvier 1759.3
J'ai reçu votre rapport du 31 décembre et vous remercie des nouvelles dont vous avez bien voulu m'instruire. Ce que vous me marquez de ce que le Grand-Veneur vous a fait dire de bouche au sujet du succès de sa corvée faite à Varsovie,4 me fait présumer que sa cour est encore bien indécise sur le parti qu'elle voudrait prendre, que le maître voit avec indolence souffrir ses États héréditaires, et que le ministre,5 n'ayant pas de système que du jour au lendemain, ne s'efforce que de distraire son maître par des frivolités, ne prend guère à cœur le salut de la Saxe et, nullement ami du Grand-Veneur, a prévenu son maître contre tout ce qu'il a voulu lui apprendre de la situation présente de la Saxe, et lui a fait imposer par des contes en l'air. Enfin, quand je combine à cela ce que j'ai appris de Varsovie, que, sur les lamentations que le Grand-Veneur a faites, il n'avait reçu que des réponses très froides et très indifférentes de son maître, et que Brühl doit avoir se6 glorié d'avoir triomphé de son antagoniste comme d'un homme qu'il n'aime pas, vous verrez par là combien il est nécessaire que vous observiez ce que je vous ai prescrit par ma lettre antérieure,7 afin que
1 Vergl. Bd. XVII, 428. 437.
2 Vergl. Bd. XVII, 428. 438. 440.
3 Vergl. zum 4. Januar auch das Schreiben an Algarotti, Breslau 4. Januar, in den „Œuvres“ Bd. 18, S. 117; die Schreiben an Algarotti, d'Argens, Voltaire u. A. aus diesen Jahren kommen auch für die politischen und militärischen Anschauungen des Königs vielfach in Betracht.
4 Vergl. Nr. 10630.
5 Graf Brühl.
6 So.
7 Nr. 10630.