<220> Quand d'ailleurs je combine à tout cela que, quand la France fera sa paix avec l'Angleterre à mon inclusion même, je garderal, malgré cela, sur les bras toutes les forces autrichiennes et russiennes et peut-être les Suédois au surplus, dont les deux cours, à ce [que] le duc de Choiseul est convenu lui-même, voudront se dédommager, la campagne qui vient, sur moi, en se flattant que le sort et leurs forces supérieures décideront cette année en faveur des vœux et des désirs des Impératrices, en agissant de la manière la plus vigoureuse partout contre moi : voilà pourquoi je me suis déterminé à ne point refuser la bonne volonté que la Porte témoigne à mon égard, mais de procéder incessamment à la conclusion de l'alliance défensive qu'elle m'offre présentement.
Si, en attendant, la paix se fera entre la France et l'Angleterre à mon inclusion, même sans cessions de ma part, ni conditions onéreuses pour moi, j'en serai bien aise et j'y souscrirai de bon cœur et de bonne foi. Mais, si, indépendamment de cela, les cours de Vienne et de Pétersbourg voudront continuer à me pousser de toutes leurs forces, jointes à celles de l'Empire, qui, au bout du compte, sauraient m'accabler par leur trop grande supériorité, quand même l'Angleterre voudrait, à ce que je me flatte toujours, faire couvrir mon flanc gauche du côté de Magdeburg et de Saxe,1 saurait-on prendre en mauvaise part en Angleterre que je me servisse du secours puissant que la Porte m'offre si généreusement, et qui obligerait au moins mes ennemis de détacher considérablement de toutes ces troupes qui, sans cela, sont destinées de m'accabler, par où j'aurai les bras plus libres à ma défense, et ce qui forcera mes ennemis à accepter bientôt la paix générale à des conditions raisonnables et honorables? Voici ce dont vous vous expliquerez confidemment avec M. Pitt et ensuite à ceux des ministres anglais à qui il sera convenable. Vous prierez l'autre de ma part de vouloir bien considérer la situation très gênante et critique où je me trouve actuellement, quand même la paix se ferait avec la France, et qu'il ne me restait alors que de me fier sur l'Angleterre, comme à ma fidèle et unique alliée, à laquelle je resterai également attaché, et de profiter des puissants secours que, selon toutes les apparences, la Porte me prêtera. Vous direz, d'ailleurs, aux ministres que je croyais que dans cette situation l'Angleterre n'aurait pas besoin de faire des sacrifices à la France à mon égard, ni pour l'amour de moi, mais qu'ils sauraient proposer à la France des conditions de paix et des cessions de sa part telles qu'ils les trouveraient à la convenance de la Grande-Bretagne, et que j'étais persuadé que la France les souscrirait toutes au gré des ministres anglais. Que, pour moi, je serai content, pourvu que la France ne se mêlerait plus, ni directement ni indirectement, de la guerre que les
1 Vergl. Nr. 11927.