12045. AU MINISTRE D'ÉTAT COMTE DE FINCKENSTEIN A MAGDEBURG.
Finckenstein berichtet, Magdeburg 27. April, auf Grund eines Schreibens von Münchhausen, d. d. Hannover 25. April:
„Ce ministre me marque qu'il a reçu un ordre exprès de Sa Majesté Britannique de me communiquer sous le sceau du secret le plus absolu une ouverture qui venait de lui être faite par la cour de Danemark. Que le baron de Bernstorff, dans une conférence qu'il avait eue avec le baron de Steinberg,305-1 avait témoigné à ce dernier que les vastes projets de la Russie et en particulier les desseins quelle formait sur le royaume de Prusse, causaient une inquiétude d'autant plus vive à sa cour, qu'elle ne comprenait que trop ce qu'elle aurait un jour à craindre de l'augmentation de puissance qu'une acquisition aussi importante donnerait à la Russie. Que cette considération demandait qu'on prît ses mesures en conséquence; mais qu'avant de pouvoir proposer à Sa Majesté Danoise le plan qu'elle aurait à suivre, il s'agissait de savoir, primo, si Votre Majesté avait des engagements avec le grand-duc de Russie qui Lui liaient les mains, puisque la négociation à entamer serait inutile, si des engagements pareils subsistaient. Qu'on souhaitait d'être instruit, secundo, de ce que Votre Majesté voudrait faire pour un prince qui était dans l'intention de L'assister par terre et par mer, pour reconquérir la Prusse, et pour Lui en assurer la possession. Qu'il remettait à la prudence de Sa Majesté Britannique si elle trouverait à propos de procurer à Sa Majesté Danoise un éclaircissement sur ces deux points, mais qu'il espérait en même temps que le roi d'Angleterre, qui ne pourrait méconnaître le danger auquel sa cour s'exposait par une pareille confidence, voudrait en faire usage avec tous les ménagements possibles. Qu'il ne s'agissait pas, au reste, d'obtenir des subsides, quoiqu'on pourrait se stipuler quelque secours, si l'affaire parvenait à sa maturité. Qu'enfin il se voyait obligé de déclarer que le Roi son maître n'abandonnerait jamais le parti de la neutralité par rapport aux autres puissances belligérantes, et que le seul but qu'on se proposerait, serait de conserver la Prusse à Votre Majesté. Que Sa Majesté Britannique, après avoir reçu cette ouverture, avait d'abord résolu de la faire passer à Votre Majesté par mon canal, pour apprendre Ses sentiments, tant Sur la négociation en général que par rapport aux explications que la cour de Danemark demande. Que le secret exact et inviolable que le roi de la Grande-Bretagne croyait devoir garder à cette cour, qu'il se promettait de même de la part de Votre Majesté et qui lui paraît absolument nécessaire, si l'on voulait faire réussir l'affaire, l'avait empêché d'en donner connaissance aux ministres de Votre Majesté qui résident à Londres, et que Sa Majesté Britannique souhaitait que la réponse de Votre Majesté qu'elle attendait aussitôt que possible, ne lui parvienne que par le même canal par lequel elle faisait passer cette confidence, sans que les autres en fussent instruits, et que lui, baron de Münchhausen, tenait prêt un courrier qui porterait cette réponse en Angleterre, au moment même qu'il la recevrait.“
Camp de Meissen, 29 avril 1760.
Je commence par vous répondre à la lettre bien intéressante que vous m'avez faite du 27 de ce mois, touchant l'ouverture que le baron Münchhausen vous a faite par rapport à la déclaration qui lui a été faite de la part de la cour de Copenhague. Dans la situation critique où je me trouve actuellement encore, la bonne raison demande que je ne refuse aucun moyen qui se présente pour m'aider, et je regarde l'offre du Danemark pour d'autant plus acceptable que son salut et sa<306> propre conservation l'exige à prendre à temps encore ces engagements que ses intérêts les plus essentiels demandent absolument et sans perdre plus de temps.
En cette considération vous devez donc déclarer de ma part en réponse à la lettre du baron Münchhausen : que i° je n'avais aucun engagement avec le Grand-Duc, que 2°, comme le roi de Danemark m'offre généreusement son assistance par terre et par mer pour m'aider à reconquérir ma Prusse et pour m'en assurer la possession, et que, de cette façon, ce Prince entre dans une guerre qui ne le regarde pas directement jusqu'à présent, je veux en reconnaissance bien lui offrir des subsides en argent de 2 à 3 et même 400000 écus, selon que vous le trouverez nécessaire et convenable, et lui garantir sans difficulté 3° la possession des États de Schleswig, que l'Angleterre, à ce que je ne sais pas autrement, lui a déjà garantie, à laquelle je me joindrai, le cas l'exigeant, pour soutenir le Danemark dans sa possession du susdit Schleswig. Voilà mes offres.
Quant aux demandes que je fais réciproquement du Danemark, la principale est qu'il envoie au plus tôt mieux sa flotte vers les côtes de la Poméranie, pour soutenir ma ville de Colberg contre les entreprises et les débarquements que les Russes méditent de faire; 2° que la cour de Danemark me garantisse réciproquement, outre la possession de ma province de Prusse, encore celle de mes provinces limitrophes à la Baltique, savoir la Poméranie. Quant à mes autres provinces, nommément la Silésie, je l'en dispense entièrement et ne prétends point sa garantie.
Ce que je souhaite, au surplus, c'est que cette négociation s'achève et finisse au plus tôt et avant que les Russes sauraient se nicher en quelque endroit de la Poméranie, où vous savez que j'envoie d'abord mon frère Henri avec un corps de troupes considérable pour la protéger contre les irruptions que les Russes y voudraient faire par terre.
Vous assurerez le baron Münchhausen du secret que je lui garderai sur cette affaire, et quant aux autres compliments que vous lui ferez sur cette communication confidente, cela va sans dire.
Comme le baron de Bernstorff pourra apparemment contribuer le plus à la prompte conclusion de cette affaire, je voudrais bien que vous lui fassiez faire quelque appât par un présent que je lui ferai à part et indépendamment de la somme des subsides que vous stipulerez, de sorte qu'il ne dépendra que de la façon la plus convenable et la plus honnête qu'on le lui offrira de bonne grâce et sans le rebuter, à quoi vous songerez. Je laisse à cette fin à votre pénétration s'il conviendra ou non de donner au moins quelque avertissement en gros de cette affaire à mes ministres à Copenhague.
Ce que je vous demande, au reste, c'est que vous prépariez incessamment tous les pleins pouvoirs avec toutes les instructions qu'il faudra pour la conclusion la plus prompte de cette affaire, afin de pouvoir me<307> les envoyer à ma signature, avant que les opérations de la guerre sauraient ou m'éloigner plus de vos lieux, ou que la correspondance entre nous saurait devenir plus mal sûre qu'elle ne l'est encore; mais la chose la plus intéressante et la plus principale que je vous recommande au mieux, c'est de presser extrêmement la conclusion de cette affaire, pour que cela ne soit de la moutarde après dîner.
Voilà bien des bonnes espérances, il faut battre le fer, pendant qu'il est chaud; car la moindre chose le peut refroidir. Je connais trop les gens auxquels j'ai à faire.
Federic.
P. S.
J'ai reçu la lettre que vous m'avez écrite du 26 de ce mois, par laquelle j'ai vu avec satisfaction la diligence que vous avez employée pour envoyer au baron de Knyphausen ce projet dont je vous avais chargé, d'un article à insérer dans les préliminaires de la paix entre l'Angleterre et la France, qui saurait servir de base à cette négociation, pour ce qui regarde mes intérêts.307-1 Je ne saurais, d'ailleurs, qu'applaudir aux remarques que vous m'avez communiquées à ce sujet; mais, pour m'expliquer avec franchise et confidence à vous sur la façon dont j'envisage cette affaire en général, c'est qu'il n'en sera rien encore et qu'on ne conviendra de rien :
1° parceque je crois entrevoir assez clair que l'Angleterre n'a pas tout de bon envie de finir dans le moment présent, au milieu des succès qu'elle a eus contre la France, et qui lui promettent encore de plus grands avantages sur la France, ainsi que tout ce qu'elle a fait jusques à présent pour acheminer cette paix, n'a été qu'en considération de ma situation critique dont elle a voulu me relever; et
2° la France n'a agi que fort artificieusement avec l'Angleterre, à laquelle, à ce qu'on pénètre bien, elle ne voudra pas faire de grandes cessions, dès qu'il lui aurait réussi de séparer l'Angleterre d'avec moi.
Au reste, il faudrait que je fusse insensé que de consentir jamais que la France fît sa paix séparée à mon exclusion, et que je renonçasse par là aux engagements que l'Angleterre a pris avec moi, et aux promesses les plus fortes qu'elle m'a données, qu'elle n'écouterait à aucune proposition de paix de la France qu'à mon inclusion, et avant qu'il ne fût pourvu à ma sûreté et à mes intérêts. Voilà sur quoi vous dirigerez toujours vos opérations dans cette affaire.307-2
<308>Au reste, mes ressources sont les Turcs à présent et les Danois, desquels je me promets l'assistance la plus efficace; c'est pourquoi je ne saurais assez vous recommander de presser vivement cette négociation dont il s'agit dans ma lettre d'aujourd'hui.
Federic.
Nach der Ausfertigung. Der Zusatz — vor dem Postscriptum — eigenhändig.
305-1 Dem hannoverschen Gesandten in Kopenhagen.
307-1 Vergl. Nr. 12033. 12034.
307-2 Mitchell berichtet, Meissen 30. April, an Holdernesse: „The King of Prussia said to me this day, that he thought the negociation with France was now entirely broken off . . . I fairly told him, that I never had the least hopes that any good could come of the négociation at the Hague, and that, whilst the Duke de Choiseul remained in office at the head of foreign affairs, I could not believe, that France was in earnest to treat with England. The King of Prussia replied that he was very much of the same opinion.“ [London. Public Record Office.]