12166. AU PRINCE HENRI DE PRUSSE.

Au camp de Meissen, 12 juin 1760.

Je viens de recevoir la lettre du 10 que vous m'avez faite, et vous envoie ci-joint ce que j'ai reçu, presqu'en même temps, des nouvelles de Pétersbourg et de Danzig,418-1 que vous aurez déjà de plus fraîche date.

J'approuve toutes les manœuvres que vous voudrez faire, sans entrer dans les détails d'aucune, parceque les nouvelles différentes que vous pourrez recevoir d'un jour à l'autre, ou les mouvements de l'ennemi pourront vous obliger à tout moment de changer de mesures. Votre grand but doit être seulement de sauver l'État et d'empêcher, tant qu'il dépendra de vous, que l'ennemi ne puisse prendre pied dans aucun endroit.

Quant aux différents projets que vous avez,418-2 je vous les abandonne absolument et à votre prudence; ainsi vous n'avez qu'à agir absolument, selon que vous le trouverez bon et à propos, et selon que les moyens que vous avez, vous le permettront.

La manœuvre de Laudon est presque incompréhensible. Pourquoi venir à Frankenstein? pourquoi se retirer de la Silésie par Silberberg? Et, s'il veut faire le siège de Glatz, pourquoi ne pas laisser un corps à Wartha qui est assez fort? Il y a du mystère en tout cela. Je ne puis pas dire en quoi il consiste, mais il est bien sûr que, depuis le<419> passage de Bréteuil et l'arrivée de Paulmy à Vienne,419-1 il y a eu là beaucoup de conférences extraordinaires, et que les manœuvres de ces gens-là ont changé. J'ai les mêmes nouvelles de la Haute-Silésie qu'il n'y a pas un canon de parti d'OImütz. Je n'aime pas à me flatter ni à me faire des illusions, pour supposer qu'il se soit passé quelque chose à Constantinople; mais, comme je n'ai aucune nouvelle de ce pays-là depuis le 11 d'avril, je ne veux pas me bercer d'une illusion si agréable.

Je passerai cependant l'Elbe le 15, comme je vous l'ai écrit; mais, comme je crois me convenir de ne rien hasarder dans la situation des choses, avant que de voir plus clair dans les manœuvres de l'ennemi et quelles seront leurs opérations décidées, je me contenterai de tenir mon camp de Proschwitz, et je ne hasarderai rien, à moins que la force des conjonctures ne m'y oblige. Je me contenterai d'empêcher les incursions que l'ennemi pourrait faire du côté de la Marche. Au reste, je me réfère à tout ce que je vous ai écrit hier.419-2

Federic.

Nach der Ausfertigung.



418-1 Liegen nicht vor.

418-2 Der Prinz wollte versuchen, falls die Russen in ihrer Stellung diesseits und jenseits der Weichsel blieben, „de faire un coup sur l'un ou l'autre de leurs détachements, si je n'en suis pas empêché par le manque de charriage (vergl. Nr. 12 159) et de subsistance, ou que l'ennemi se rassemble.“

419-1 Vergl. S. 392.

419-2 Nr. 12159.