12189. AU PRINCE HENRI DE PRUSSE.

Radeburg, 20 juin 1760.

J'ai bien reçu votre lettre du 17 de ce mois, et j'approuve fort toutes les mesures que vous prenez,434-3 et réellement on ne peut pas mieux dans la situation où vous vous trouvez; mais je crois devoir vous informer de la façon dont les Russes marchent et se pourvoient ordinairement de vivres, pour que vous ne vous y trompiez pas, et que vous ne preniez pas le change. Lorsqu'ils se mettent en marche, ils sont pourvus de vivres pour six semaines; chaque chambrée a une voiture où elle mène sa farine, son gruau et son huile avec elle: d'où il est facile à comprendre que la perte de quelques-uns de leurs magasins qu'ils ont sur la Vistule, ne les obligerait point à se replier. Mais si dans leurs marches il se trouvait une occasion de tomber sur l'arrièregarde et de prendre tous ces chariots de l'armée, cela seul vaudrait autant qu'une bataille et les obligerait à s'enfuir bien vite.

Quant aux Autrichiens, autant que j'en puis juger à présent, ils n'ont aucune intention de pénétrer dans la Marche.

Je vous ai écrit hier434-4 que mon dessein m'a manqué ici. Lacy s'est retiré le 18 au soir à Radeberg, et je sais par des prisonniers qu'il irait jusqu'à Stolpen. Si je faisais mine de le suivre, Daun étant dans le camp de Reichenberg, il m'est impossible de m'aventurer plus avant. Les troupes des Cercles arriveront le 22 à Dresde, les détachements des Autrichiens les convoient jusqu'à Chemnitz, ils filent à travers les montagnes, de sorte qu'à présent il ne dépend pas de moi de les chasser. Je suppose que Daun y ajoutera à peu près 10000 hommes et qu'alors, avec le reste de son armée, il voudra traverser la Lusace pour entrer en Silésie. Je prends tous mes arrangements pour l'y suivre, si cela est nécessaire, et pour me joindre à Fouqué; mais, s'il n'arrive point quelque évènement favorable, je vous avoue que je crains que cette campagne-çi sera malheureuse. Quelque nouvelle que j'apprenne, je ne manquerai pas de vous la communiquer.

Federic.

Nach der Ausfertigung.

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434-3 Der Prinz hatte geschrieben, er werde über Landsberg nach Driesen marschiren; den General Goltz lasse er in Frankfurt zurück, „tant pour avoir l'œil sur Posen que pour observer ce qui se passe du côté des Autrichiens“ . Wenn die Russen sich nach Schlesien wenden sollten, werde er sich mit Goltz vereinigen, um sie von Posen abzuschneiden. „Si l'ennemi reste tranquille, ...je m'étudierai ... pour couper un de ces corps détachés ou bien prendre un magasin .., sans négliger d'avoir un corps prêt à passer l'Oder, en cas que les Autrichiens envoient vers Francfort.“

434-4 Vergl. Nr. 12185.