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Qu'après l'affaire d'Iglau les Saxons avaient voulu s'en aller, ce qui a retardé les opérations de huit jours. Que le cercle d'Iglau ayant été entièrement mangé par l'ennemi, j'avais voulu faire marcher les Saxons à Frating et à Waidhofen, et qu'à cette fin je m'étais porté dans la Basse-Autriche jusqu'à Rötz et autres postes avancés; mais comme ni le comte Rutowski, ni le Chevalier de Saxe, dont j'ai les lettres encore en main, n'avaient jamais voulu suivre mes ordres et représentations, après quinze ou seize jours que les Saxons étaient entré à Teltsch et Iglau, ils étaient affamés, comme je l'avais prévu.

Sur quoi les Saxons m'avaient demandé la cession de mes quartiers de Znaym et de ces environs-là. Que pour leur donner des marques de ma condescendence et des soins que je voulais avoir pour leur troupes, je leur avais cédé tous les quartiers de Znaym et Budwitz qu'on m'avait demandés, et que je m'étais enclavé avec le corps de toutes mes troupes entre la Schwarzawa, la Morawa et la Taya, formant par mon aile droite le blocus de Brünn. Nous étions convenus alors que les Saxons bloqueraient de leur côté Brünn; mais que j'avais reçu des lettres du Chevalier de Saxe que toute son infanterie ne se réduisait qu'à 5,000 hommes de gens capables pour faire le service, ainsi qu'il lui fallait toute son infanterie sans exception pour faire le blocus de Brünn.

Que j'avais eu beaucoup de chagrin de ces menées, d'autant plus que par l'évacuation de la part des Saxons de Znaym, de Teltsch et de Budwitz le but de mon dessein était manqué, dont le principal objet était de tenir, par les attentions sur la Basse-Autriche, le prince Charles de Lorraine et le prince Lobkowitz en respect, par l'appréhension que s'ils marchaient sur M. le maréchal de Broglie, ils seraient coupés par leur derrière de Krems et de Linz.

Depuis ce temps-là, les Autrichiens ont fait brûler par une troupe d'incendiaires plus de vingt villages de nos cantons. Les hussards, dont le nombre se réduit à plus de 6,000 hommes, qui nous entourent tant du côté de la Basse-Autriche que de la Hongrie, de la Bohême et de la Haute-Silésie également, nous dérobent toute la subsistance et nous empêchent de faire des magasins. Les paysans, qui par ordre de la cour de Vienne s'enfuient dans les bois et les montagnes, rendent les habitations désertes, et, à nous, la subsistance si difficile, qu'à peine nous en avons huit jours d'avance pour l'armée.

Le roi de Pologne, malgré les représentations que je lui avais faites, n'a point encore fait jusqu'ici le moindre arrangement pour la grosse artillerie.

Il n'y a point de rivière navigable dans toute la Moravie. La Haute-Silésie est un pays mangé par les armées et par les quartiers d hiver. Les charrois d'Olmütz à Pohrlitz ont 24 grandes lieues de France à faire. Il n'y a presque point de chevaux dans le plat pays, de façon que je ne vois pas comment nous pourrions ouvrir la campagne dans ce pays-ci.