12810. AU MINISTRE D'ÉTAT COMTE DE FINCKENSTEIN A MAGDEBURG.
Meissen, 11 avril 1761.
J'ai reçu avec votre lettre du 9 de ce mois les dépêches que le sieur de Knyphausen m'a faites au sujet du congrès proposé par les<326> alliés de la France.326-1 Il s'en faut beaucoup que cette déclaration soit aussi bonne que celle que la France avait fait faire en Suède, et j'aurais bien souhaité que cette grande affaire de la pacification eût été traitée principalement entre les cours de Londres et de Versailles, ce qui aurait bien mieux valu et épargné beaucoup de difficultés épineuses et des longueurs inséparables d'un congrès. Avec cela, il faut toujours mieux que cette affaire soit commencée que si elle fût restée dans cette incertitude que par le passé.
Le grand article sur lequel vous aurez à travailler avec mes gens en Angleterre à présent, c'est que l'Angleterre ne décide rien avec la France à mon exclusion, et que, si les ministres anglais font un armistice avec la France, que cela soit avec mon inclusion. Mais ce qui vaudra mieux encore, c'est que l'Angleterre insiste, préférablement à tout, sur une suspension d'armes générale, tout comme sur le status quo, qui sera d'autant plus indispensablement nécessaire que, sans cet armistice général, toutes les négociations au congrès n'auront jamais des objets fixes, vu que les évènements journaliers de la guerre les changeraient du jour au lendemain, selon le train que les opérations de la campagne prendraient.
Je ne saurais point goûter la proposition que vous me faites de nommer mon plénipotentiaire au congrès le baron de Knyphausen. Vous conviendrez que, nonobstant qu'on négociera au congrès, ce sera toujours à Londres où les affaires pour convenir de la paix générale seront principalement préparées et dirigées, de concert avec la cour de France. Voilà pourquoi il faut indispensablement que le sieur de Knyphausen reste là sur son poste par toute la suite des affaires dont il est en train, et par la confiance qu'il s'est gagnée des ministres et surtout du sieur Pitt. Quelque zèle et bonnes intentions que le sieur Michell ait marqués dans toutes les occasions, il n'est cependant pas assez au fait des affaires d'Allemagne et des constitutions, pour suffire seul à cela dans ces moments très critiques. De sorte donc que je ne saurais nommer autre à présent que le sieur de Hæseler, jusqu'à ce que je voie quel train prendront les négociations au congrès, si cela ne sera que pour amuser le tapis, ou si l'on y traitera sérieusement les affaires, et, dans ce dernier cas, je ne saurais me dispenser de vous y envoyer vous-même et de vous confier là mes intérêts. Après que j'ai songé ultérieurement au choix des deux plénipotentiaires à nommer de ma part au congrès proposé, je viens de me déterminer sur le baron de Plotho, ministre à présent accrédité à la Diète de Ratisbonne, qui fera les fonctions de premier plénipotentiaire, et pour second le conseiller privé d'ambassade de Hæseler. J'en fais avertir le baron de Knyphausen, pour les nommer de ma part au ministère anglais. Le premier de ces plénipotentiaires aura en appointements la somme de 12000 écus, et cela pour un temps<327> de six mois, le second en aura 5 000 pour le même temps, en tout 17 000 écus que la caisse de légation leur paiera. Vous les en informerez d'abord, et préparerez en attendant tout ce qu'il leur faut de lettres crédentiales, pleins pouvoirs et instructions etc. Mais, quant au sieur de Hæseler, il faut qu'il vienne encore chez moi lui-même, afin que je sache le mettre entièrement au fait de mes intentions pour ce qui regarde ses négociations. Cependant, comme il faut que le baron de Plotho à la Diète de Ratisbonne soit remplacé, en attendant son retour, par quelque autre en guise d'un ad intérim, vous choisirez d'abord quelque bon iurisconsulte, versé surtout dans le droit public et dans les constitutions de l'Empire, soit du grand tribunal de Berlin, soit de quelque autre tribunal de justice là ou dans les provinces, que vous dépêcherez avec les autorisations requises à Ratisbonne, pour faire là les fonctions ordinaires du baron de Plotho pendant son absence. Ce délégué doit en attendant jouir des appointements ordinaires du baron de Plotho attachés à ce poste, jusqu'autant que celui-ci, sa commission finie au congrès, aille reprendre ses fonctions ordinaires à la Diète de Ratisbonne, où alors l'autre retournera de même à son poste.
Au reste, je vous fais communiquer une copie exacte de la dépêche que je viens de faire au baron de Knyphausen, afin qu'elle vous serve aussi de direction, et surtout quand les circonstances de ma campagne dussent exiger ma présence dans la Silésie, et que la correspondance entre nous fût interrompue, et que vous fussiez obligé par là de diriger seul ces affaires.
Federic.
Voilà un bon commencement, mais bien fou qui s'y fie.
Nach der Ausfertigung. Der Zusatz eigenhändig.
326-1 Vergl. Nr. 12809.