12821. AU FELD-MARÉCHAL PRINCE FERDINAND DE BRUNSWICK.
Meissen, 13 avril 1761.
La lettre de Votre Altesse du 8 m'a été fidèlement rendue, et je vous remercie de bien bon cœur de l'amiable et confidente communication que vous avez daigné me faire des différentes idées que vous avez conçues touchant votre campagne à faire. Je vous avoue que, pour dire avec franchise mon sentiment sur ces idées que vous me proposez, je ne balance pas un moment de préférer celle sur la Diemel préférablement à toute autre, par la raison que, si une fois vous passez le Weser avec le gros de votre armée, les deux armées françaises serront de plus en plus votre terrain qu'il ne saurait tarder guère que vous ne vous trouviez nécessité de vous approcher et de vous retirer vers Stade, ce qui causerait une très mauvaise issue de votre campagne; mais si, au contraire, vous gardez la position de la Diemel, vous ne sauriez, à la vérité, empêcher tout-à-fait que l'ennemi ne fasse des incursions dans les pays de Hanovre et de Brunswick, mais ces incursions n'entraîneront jamais autant de maux que si le siège des affaires y était: outre cela, comme vous le dites très bien, que, quand l'ennemi voudra passer le Weser, vous serez toujours alors à même de lui marcher à dos. Enfin, ce projet de la Diemel est, sans contredit, le meilleur et à préférer à tout autre. Je ne saurais pas disconvenir qu'il soit sujet à bien des inconvénients, mais les inconvénients qui Assortiront de l'autre projet, sont bien plus grands et importants, vu qu'ils s'originent335-1 de la supériorité de l'ennemi.
En attendant, il y a présentement plus d'espérance que jamais que vous vous passerez de tous ces inconvénients, après que la France vient de proposer depuis peu une suspension d'armes à l'Angleterre, et qu'il y a toute apparence que celle-ci l'acceptera.
Quant aux troupes que j'ai détachées sur la Werra,335-2 je ne saurais les laisser là plus longtemps, malgré toute ma bonne volonté, que jusqu'à la fin de ce mois, où il faudra que j'assemble tout ce que j'ai ici de forces, parcequ'il sera nécessaire que je passe aux premiers jours de<336> mai en Silésie pour y tout défendre. J'attends ici mon frère Henri, auquel je laisserai le commandement du corps d'armée qui restera en Saxe, et que j'instruirai amplement sur tout ce qui regarde vos affaires.
J'ai appris avec bien de la satisfaction la nouvelle que votre courrier m'a dite, que les troupes sous Broglie rétrogradent toutes vers le Main et vers Francfort, excepté une faible garnison qu'ils laissent à Cassel. J'en suis d'autant plus aise que vous gagnerez par là du temps à pouvoir respirer. Je vous communique ci-clos une lettre d'un officier saxon336-1 interceptée ici, afin que vous en fassiez votre usage.
Au surplus, quand une suspension d'armes entre la Grande-Bretagne et la France sera tout-à-fait constatée et publiée même auprès de l'armée sous vos ordres, j'ose espérer que vous voudrez bien, à cette occasion et dans ce cas-là, me renvoyer alors mes hussards et mon bataillon franc, dont j'aurai ensuite grand besoin.
Federic.
Les troupes des Cercles ont perdu en tout 11 canons à cette expédition;336-2 mais cela ne décide de rien, il faut dans cette guerre ici frapper de grands coups, et cela est plus facile à dire qu'à faire.
Federic.
Nach der Ausfertigung im Kriegsarchiv des Königl. Grossen Generalstabs zu Berlin. Der Zusatz eigenhändig.
335-1 So.
335-2 Vergl. S. 296. 310. 311. 316.
336-1 D. d. „Cantonnirungsquartier Weissenau bei Mainz“ 4. April.
336-2 Vergl. Nr. 12804.